Newsletter Legal & Tax Alert #12

Newsletter Legal & Tax Alert #12 | Juin 2023
Nous sommes ravis de vous faire partager notre Lettre Juridique et Fiscale, qui reprend les points clefs de l’actualité législative et jurisprudentielle du mois de juin. Vous y retrouverez notamment des informations sur les fusions transfrontalières, les prises de décision minoritaire au sein des SAS, les BSPCE, les impôts locaux et bien d’autres sujets encore…

Brève | Une nouvelle décision sur la déclaration d’inaptitude du salarié par le médecin du travail

Par Nicolas Chataignier, Avocat Associé | Mazars Société d'Avocats

Il résulte d’un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 24 mai 2023 [1], que le médecin du travail peut constater l'inaptitude d'un salarié à son poste à l'occasion d'un examen réalisé à la demande de celui-ci sur le fondement de l’article R.4624-34 du Code du travail dans sa rédaction issue du Décret du 27 décembre 2016, peu important que l'examen médical ait lieu pendant la suspension du contrat de travail.

Cette décision est fondée sur l’article L.4624-4 du Code du travail, qui fixe les conditions préalables au constat de l’inaptitude, et sur l’article R.4624-34 du Code du travail qui prévoit notamment qu’indépendamment des examens d'aptitude à l'embauche et périodiques, ainsi que des visites d'information et de prévention, le travailleur bénéficie, à sa demande ou à celle de l'employeur, d'un examen par le médecin du travail.

Sous l’empire des textes antérieurs, la Cour de cassation admettait déjà que le médecin du travail puisse constater l’inaptitude après tout examen médical qu’il pratique au cours de l’exécution du contrat de travail (notamment, Cass. Soc. 21/09/2017, no 16-16.549).

Mais l’arrêt commenté admet que l’inaptitude puisse être constatée même durant une période de suspension du contrat de travail consécutive à la maladie.

Il reste notamment à trancher la question de savoir si l’inaptitude pourrait être constatée à l’occasion d’une visite de pré-reprise. On notera, à cet égard, que l’arrêt commenté prend soin de relever que  le médecin du travail avait visé l'article R. 4624-34 du code du travail pour la visite et l'article L. 4624-4 du même code pour l'avis d'inaptitude lui-même.

De plus, la conjonction entre une période de suspension du contrat de travail et une déclaration d’inaptitude pose d’importantes questions pratiques et juridiques que la jurisprudence devra trancher, telle que la question du licenciement du salarié déclaré inapte, en l’absence de reclassement possible, en cas de suspension du contrat en lien avec une maladie professionnelle ou un accident du travail, ou encore en présence d’une  clause conventionnelle de garantie d’emploi applicable durant la période de suspension du contrat.

Dans l’attente de clarifications jurisprudentielles, la prudence s’impose…

[1] Cass. Soc., 24/05/2023, n°22-10.517.

Brève | Exonération de CFE pour les parcs photovoltaïques installés sur des terrains cultivés

Par Cassandra Ferstler | Mazars Société d'Avocats

Par un arrêt du 26 mai 2021 [1], la Cour administrative d’appel de Nantes (CAA) s’est prononcée sur l’application d’une exonération de cotisation foncière des entreprises (CFE) à un parc photovoltaïque situé sur des terrains cultivés.

En l’espèce, une société exploitait une ferme solaire sur des terrains dont elle était propriétaire. Les terrains exploités avaient fait l’objet d’un ensemencement en 2014 en vue de faire pâturer des ovins dès 2017, pour entretenir les espaces verts et préserver le bon fonctionnement des installations.

L’administration fiscale a notifié à la société des impositions supplémentaires de CFE au titre des années 2015 et 2016 au motif qu’elle exerçait une activité industrielle sur ces terrains, entrant dans le champ d’application de la taxe. La société a contesté cette analyse.

Dans un premier temps, la CAA de Nantes reconnaît effectivement que les moyens mis en œuvre pour cette production d’électricité constituent une activité industrielle. Elle rappelle ensuite que la CFE a pour base la valeur locative des biens passibles d’une taxe foncière et que les terrains non cultivés employés à un usage industriel sont soumis à cette taxe (articles 1467 et 1381, 5° du code général des impôts).  

Dès lors, même en l’absence de l’activité de pâturage, ces terrains ensemencés ne pouvaient être qualifiés comme « non cultivés ». En conséquence, la cour a prononcé la décharge des impositions de CFE susvisées.

[1] CAA de Nantes, 26 mai 2023, n°22NT01252, SAS Fillé A.

Brève | Liberté contractuelle et prise de décision minoritaire au sein de la SAS (CA Paris, 04/04/2023, n°22/05320)

Par Benjamin Levy, Avocat| Mazars Société d’Avocats et Alan Boutine, Avocat | Mazars Société d’Avocats

La liberté contractuelle qui caractérise la SAS permet-elle à des associés détenant ensemble moins de 50% des droits de vote lors d’une décision collective de faire adopter à eux seuls une décision d’associés ? Par un arrêt du 19 janvier 2022[1], la Cour de cassation a répondu par la négative en indiquant que « cette liberté dans la rédaction des statuts trouve sa limite dans la nécessité d’instituer une règle d’adoption des résolutions soumises à l’examen collectif des associés qui permette de départager ses partisans et ses adversaires. » et qu’ainsi, « les résolutions ne peuvent être adoptées par un nombre de voix inférieur à la majorité simple des votes exprimés ».

La Cour d’appel de Paris, par un arrêt du 4 avril 2023[2], statuant sur renvoi de l’arrêt de la Cour de cassation précité, résiste à cette position, en indiquant « …qu'il est loisible aux associés de définir dans les statuts une procédure d'adoption […] qui n'applique pas une règle de majorité, telle qu'une condition de seuil dont la seule atteinte permet de considérer comme adoptée la résolution soumise au vote ». 

Face à cette résistance, nul doute que l’assemblée plénière de la Cour de cassation devrait prochainement trancher la question de manière définitive.

[1] Cass. Com. 19 janv. 2022, n°19-12.696

[2] CA Paris, 4 avr. 2023, n°22/05320

Brève | Transposition en France de la directive « Transformations/Fusions/Scissions transfrontalières » 2019/2121 du 27 novembre 2019 : mieux vaut tard que jamais !

Par Agathe de Lorenzi, Avocate | Mazars Société d'Avocats

Ces dernières années, lorsqu’un praticien français présentait un mémorandum sur une opération transfrontalière, il était prévoyant de préciser que le calendrier de réalisation de l’opération était établi sous réserve de la transposition de la directive (UE) 2019/2121 du 27 novembre 2019 sur les transformations, fusions et scissions transfrontalières.

En effet, cette directive, appelée à modifier sensiblement le processus de réalisation de ce type d’opérations, devait être transposée par les Etats membres avant le 31 janvier 2023.

En France, cette transposition n’est intervenue que très récemment, suite à la réception d’une mise en demeure de la Commission européenne, pour transposer notamment cette directive.

La transposition est intervenue par ordonnance 2023-393 du 24 mai 2023 « portant réforme du régime des fusions, scissions, apports partiels d’actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales », accompagnée de son décret d’application 2023-430 du 2 juin 2023.

Nous reviendrons plus en détail sur certains points de cette réforme mais nous pouvons d’ores et déjà souligner les apports suivants :

  • Harmonisation du régime des opérations transfrontalières ;
  • Réglementation de la transformation transfrontalière, qui encadre les transferts de siège au sein de l’Union Européenne, et réglementation de la scission transfrontalière (scission complète, scission partielle, apport partiel d’actif) ;
  • Jusqu’à présent, ces opérations n’étaient pas encadrées et rencontraient des difficultés d’ordre pratique liées à l’application des différents droits nationaux ;
  • Renforcement de la protection des intérêts des associés, des créanciers et des salariés des sociétés impliquées dans ces opérations ;
  • Allongement des délais de réalisation de ces opérations (avec un délai d’opposition des créanciers de 3 mois et un contrôle national renforcé).

Cette réforme s’appliquera aux opérations pour lesquelles le projet sera déposé au greffe du tribunal de commerce à compter du 1er juillet 2023.

Les praticiens en manque d’adrénaline apprécieront ce timing…

Brève | Taxe annuelle sur les bureaux en région PACA – Il ne vous reste plus que quelques jours pour effectuer votre déclaration et votre paiement !

Par Cassandra Ferstler | Mazars Société d’Avocats

Instituée par la loi de finances pour 2023 et codifiée à l’article 231 quater du code général des impôts (CGI), la taxe annuelle sur les bureaux en région PACA, concernant les départements des Bouches-du-Rhône (13), du Var (83) et des Alpes-Maritimes (06), est à déclarer et à payer avant le 1er juillet 2023.

Cette taxe est due par les propriétaires (ou titulaires d’un droit réel) au 1er janvier 2023 et s’applique, pour les départements concernés, aux locaux ci-après :

  • Les locaux à usage de bureaux et leurs dépendances immédiates et indispensables destinés à l’exercice d’une activité professionnelle ;
  • Les locaux commerciaux destinés à l’exercice d’une activité de commerce de détail ou de gros et de prestations de services à caractère commercial ou artisanal ainsi que de leurs réserves attenantes, couvertes ou non couvertes, et des emplacements attenants affectés en permanence à ces activités de vente ou de prestation de service ;
  • Les locaux de stockage ou aires couvertes destinés à l’entreposage de produits, de marchandises ou de biens et qui ne sont pas intégrés topographiquement à un établissement de production ;
  • Les surfaces de stationnement couvertes ou non, destinées au stationnement des véhicules et qui ne sont pas intégrés topographiquement à un établissement de production.

La taxe est due même en cas d’inoccupation du local.

L’article 231 quater du CGI liste les différentes exonérations principalement liées à la surface, la localisation, l’aménagement ou l’utilité du local.

Le montant de la taxe dépend de la typologie du local. Les tarifs feront l’objet d’une mise à jour annuelle. Pour cette année 2023 :

Type de local

Tarifs

Locaux à usage de bureaux

0,94€/m²

Locaux commerciaux

0,39€/m²

Locaux de stockage

0,20€/m²

Surfaces de stationnement

0,13€/m²

En pratique, la déclaration se fait à l’aide du formulaire n°6705-B et doit être adressée, accompagnée du paiement, au service des impôts des entreprises du lieu de situation des locaux imposables.

Enfin, il est à noter qu’à compter de 2024, la déclaration et le paiement de cette taxe seront à déposer avant le 1er mars.