Adaptation au changement climatique : où faut-il investir ?

Le 2 avril 2024 |
Alors qu’un rapport de la Cour des comptes met en avant le dilemme entre l'injonction de s'adapter et celle de se désendetter, les acteurs du monde économique ont tout intérêt à se poser la question de la pertinence de leurs investissements. Biologiste et ingénieur agronome, Maximilien Rouer est associé Mission adaptation et régénération chez Mazars en France. Son dernier ouvrage La France Bleu Blanc Vert, conçu avec 40 spécialistes de l’adaptation, modélise pour la première fois le financement de l'adaptation au changement climatique sur le territoire.

La crise climatique n’offre plus de répit : nous devons mener, en parallèle, la diminution de nos émissions de gaz à effet de serre, et l’adaptation de nos territoires à des climats extrêmes. Ces deux combats sont indissociables : en nous adaptant à court terme - par exemple, en installant une climatisation, nous aggravons le problème à long terme, sans le résoudre.

Or, en dépit d’une médiatisation accrue, le sujet de l’adaptation reste en sursis. La France n’est pas prête. Nous devons pourtant adapter nos territoires en réalisant les investissements nécessaires dans nos villes et nos campagnes. Pour agir, il faut chiffrer, modéliser : s’adapter aux fortes chaleurs, concrètement, combien ça coûte ? Où faut-il concentrer les investissements ? 

Contre la chaleur en ville, des solutions à portée de main

Ne cédons pas à la tentation du « tout technologique » : le concept de la smart city bardée de capteurs n’est pas soutenable sous 50°C - les spécialistes eux-mêmes n’y croient pas. Pour lutter contre la chaleur en ville, la priorité doit être d’apporter de l’ombre à l’échelle du bâti, à travers l’intégration d’ombrières, notamment photovoltaïques, et la technique du cool roofing via des peintures adaptées sur les toits, pour limiter la hausse des températures à l’intérieur des bâtiments.

Une autre solution des plus low tech est la plantation de plantes grimpantes sous forme de pergolas végétales. Donnons la priorité à ces solutions à coût maîtrisé, simples, largement éprouvées et immédiatement applicables.

En zone rurale, protéger les cultures des extrêmes à venir

En milieu rural, nous devons à la fois garantir la présence de l’eau dans le sol et réduire l’effet « grille-pain » du soleil sur les cultures. La réintégration des arbres et des haies à travers l’agroforesterie, la création de retenues collinaires pour améliorer le stockage de nos eaux de pluies, sont autant de pistes efficaces à explorer.

Enfin, avec 27 millions d’hectares de surface agricole utile, la France a également une carte à jouer en matière d’agriculture photovoltaïque, qui permet notamment de protéger les cultures des fortes chaleurs grâce à l’ombre apportée par les installations. Le décret encadrant l’agrivoltaïsme est attendu pour début avril, ouvrant la voie à une nouvelle filière à même d’accélérer la production d’énergie renouvelable dans le monde agricole, en préservant notre souveraineté alimentaire.

Pour adapter la France au climat de demain, nous devons nous inspirer de ce qui se fait de mieux, et nous devons aller vite. Les solutions sont à portée de main : elles peuvent être simples et concrètes. N’attendons pas plus longtemps pour modéliser leur coût, et réaliser les investissements nécessaires à leur déploiement à l’échelle locale.

Tribune publiée le 22 mars 2024 dans L'Opinion

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