CESOP, un nouvel outil européen de lutte contre la fraude à la TVA

Le 22 février 2023 |
L’essor du commerce électronique conduit l’Union européenne à se doter d’un nouvel outil de lutte contre la fraude fiscale obligeant les prestataires de services de paiement à conserver et communiquer aux services fiscaux certaines informations concernant les payeurs et les bénéficiaires des paiements. Ce nouvel outil se nomme « Central Electronic System of Payment information » (CESOP) et a été adopté par le Conseil Européen avec la Directive 2020/284 (« la Directive ») du 18 février 2020.

Un objectif affiché de renforcement de la lutte contre la fraude à la TVA au niveau européen

Les transactions intra-européennes ont longtemps constitué un important vecteur de fraude à la TVA, notamment en raison des spécificités déclaratives propres à ces échanges. La dématérialisation des flux a accru ce phénomène et rendu encore plus difficile l’identification des infractions fiscales. La Directive indique ainsi clairement que « certaines entreprises fraudent en profitant des possibilités offertes par le commerce électronique pour se procurer des avantages commerciaux indus en se soustrayant à leurs obligations en matière de TVA. » Fort de ce constat, le Conseil européen à encore étoffé ses moyens de collecte d’informations et de données.

Les prestataires de services de paiement européens concernés

Ce nouvel outil concerne les « prestataires de services de paiement », à savoir les établissements de crédit, les établissements de monnaie électronique, les établissements de paiement et certains offices de chèques postaux. La Directive précise que seuls les prestataires localisés dans un Etat membre de l’Union européenne seront concernés. Par conséquent, lorsque le prestataire de services de paiement du bénéficiaire ne se trouvera pas dans l’Union, le prestataire de services de paiement du payeur sera tenu par les obligations de collecte et de déclaration.

Certains seuils ont été fixés par la Directive en imposant notamment la transmission des informations par les intermédiaires de paiement uniquement lorsque le bénéficiaire concerné est destinataire de plus de 25 paiements transfrontaliers au cours d’un même trimestre. Cette limitation pourrait notamment permettre d’éviter l’encombrement du CESOP.

Les exigences liées à la protection des données personnelles ont conduit le législateur européen à retenir un champ d’application équilibré. Ainsi, les agents d’Eurofisc devraient uniquement recevoir les données de transactions liées à une activité économique et ne pourront pas s’en servir à des fins étrangères à la lutte contre la fraude fiscale. Ces deux aspects soulèvent à ce stade de nombreuses questions sur les développements opérationnels à mettre en place par ces intermédiaires de paiement.

Une logique de responsabilisation des intermédiaires de paiement

Ces nouvelles mesures s’inscrivent dans un mouvement global de responsabilisation des prestataires de services dématérialisés, qui jouent un rôle de plus en plus important en matière de lutte contre la fraude fiscale.

Ces prestataires auront l’obligation de collecter les données reçues dans le cadre des flux financiers transfrontaliers pour les transmettre à leur Etat membre d’origine, ou aux Etats d’accueils lorsqu’ils fourniront des services de paiement dans d’autres pays européens. Ainsi, le montant, la date, l’Etat d’origine du paiement et « toute référence qui identifie sans équivoque le paiement » devront être reportés dans un formulaire électronique enregistré au niveau national. L’Etat concerné devra ensuite communiquer les informations recueillies au service compétent afin qu’elles soient stockées et recoupées au niveau européen dans le cadre du CESOP.

Les intermédiaires de paiement devront tenir des registres détaillés permettant d’identifier les flux et les bénéficiaires de paiements électroniques. Ces registres comprendront notamment le nom ou la raison sociale, les coordonnées bancaires et, s’il est disponible, le numéro de TVA du bénéficiaire. Ces informations seront conservées par l’intermédiaire pendant une durée de trois ans à compter de la fin de l’année civile au cours de laquelle le paiement aura été réalisé.

Ce système permettra aux fonctionnaires du réseau Eurofisc d’avoir une vision globale des paiements réalisés par des payeurs au sein de l’Union Européenne et d’identifier plus facilement les fraudes à la TVA.

Adapter ses process internes à l’horizon 2024

De nombreuses adaptations devront être effectuées au sein des entreprises concernées afin de satisfaire à ces nouvelles exigences. Les principaux défis consisteront notamment à identifier les transactions tombant dans le champ d’application de la Directive et à déterminer si les données requises sont disponibles et suffisamment précises. Un travail de réflexion devra conduire les prestataires concernés à adopter des procédures efficaces permettant de sécuriser la conformité de l’entité responsable sans pour autant créer de surcharge organisationnelle inutile.

Compte tenu du nombre de transactions concerné par ces nouvelles mesures, les prestataires auront intérêt à mener des analyses d’impact et à arrêter un calendrier précis pour le déploiement des nouvelles méthodes.

Les Etats membres devront transposer ces nouvelles règles au niveau national au plus tard le 31 décembre 2023 puisque l’obligation de transmission des données devrait prendre effet au 1er janvier 2024. Les premières informations devront donc être transmises le 30 avril 2024.

L’année 2024 apparait dès lors chargée face aux nombreuses mesures prévues telles que la généralisation de la facture électronique, la mise en place du e-reporting et pour certaines structures la déclaration « CESOP ». 

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