Lettre réglementaire n°38 - Septembre 2023

Les banques évoluent dans un contexte incertain marqué par la faillite de banques américaines début 2023, ce qui a un impact direct sur leur activité et sur leur résultat.
Dans le même temps, les records de température de cet été et les inondations à travers le monde nous rappellent plus que jamais l’enjeu de taille que constitue le changement climatique pour les prochaines années.
Le monde bancaire et sa réglementation doivent constamment s’adapter à ces nouveaux défis avec une place de plus en plus importante pour les risques ESG.

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Le Comité de Bâle met à jour ses Principes pour une supervision effective

Dans son communiqué du 23 mars, le Comité de Bâle annonçait la publication prochaine d’un document consultatif de révision de ses principes de supervision : BCBS Core principles for effective banking supervision ou « BCP », dont la dernière mise à jour datait de 2012.

Au-delà de la prise en compte des bonnes pratiques observées au cours de la décennie écoulée, son actualisation devenait nécessaire non seulement au regard des risques émergents apparus depuis mais surtout dans le contexte de la crise bancaire régionale aux Etats-Unis du printemps 2023, attribuée notamment à une mauvaise gestion des risques et un contrôle prudentiel inefficient. 

Pour rappel, ces BCP fournissent un standard global dans le but d’établir une fondation robuste pour la régulation, la supervision, la gouvernance et la gestion des risques de l’ensemble du secteur bancaire. Ainsi le standard instaure les pouvoirs d’évaluation des autorités de la solidité du système en promouvant une approche de supervision tant forward looking que basée sur les risques. Adressés tant aux superviseurs locaux qu’aux établissements supervisés, ces Principes encouragent l’intervention précoce et les actions de supervision au moment opportun pour réduire les menaces à la solidité du système, les autorités locales étant libres de mettre en œuvre des mesures supplémentaires si elles l’estiment nécessaire. D’autant plus que les récents évènements géopolitiques et économiques constituent de nouvelles justifications pour renforcer la supervision du système dans son ensemble, tout en maintenant une approche cohérente entre juridictions.

[1] Financial Stability Assessment Program.

ESAP : vers la standardisation d’une data de qualité, accessible à tous 

Le European Single Access Point (ESAP), constitue l’une des principales mesures pour renforcer la transparence des marchés de capitaux prise dans le cadre de l’UMC (Union des Marchés de Capitaux) en 2021[1]. En rassemblant sous un format uniforme l’ensemble des informations financières et de finance durable, l’ESAP répondra à un besoin de transparence, d’accessibilité et de fiabilisation des données communiquées par les acteurs du secteur financier.

Ainsi, l’ensemble des apporteurs de capitaux, des entreprises spécialisées dans les services financiers et dans la finance durable, mais également les PME sur une base volontaire[2], communiqueront leurs données financières et extra-financières, leurs activités et leurs produits sur une plateforme dédiée.

Cette centralisation devra également servir la compétitivité des entreprises en facilitant leur accès aux capitaux, tout en garantissant une lecture simplifiée pour les investisseurs potentiels. En servant également deux autres programmes clés de la Commission Européenne, à savoir le « Green Deal » et la stratégie de financement numérique, l’ESAP est au centre des préoccupations européennes en termes de communication financière. A la suite de l’accord entre le Conseil de l’UE et le Parlement Européen en mai 2023, un plan d’action en 3 grandes étapes permettant l’accès total à la plateforme dès 2027 a été décidé, repoussant ainsi l’échéance de finalisation initialement fixée à Décembre 2024 par la Commission.

[1]  Un point d'accès pour créer davantage des opportunités d'affaires pour les entreprises :

resource.html (europa.eu)

[2] Exposé des motifs : eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:52021PC072

Cadre réglementaire de l'UE pour l'établissement de l'euro numérique : de l'enquête à la réalisation

Alors que la phase d'investigation du projet d'euro numérique de la BCE s'achève en octobre 2023, il est prévu de prendre une décision sur le lancement d'une phase de réalisation d'ici la fin de l'année. Les avantages et les inconvénients du potentiel de l'euro numérique ont été largement débattus ces derniers mois. Le sujet a encore gagné en importance après que la Commission a publié une proposition sur l'établissement d'un euro numérique le 28 juin 2023.

En outre, au cours de l'été, la BCE a publié deux rapports d'étape, le troisième rapport et le quatrième rapport, qui expliquent la phase d'investigation en cours.

Rapports d’étape des AES : proposition d’une approche commune de l’écoblanchiment et mise en garde contre ses risques

En mai 2022, la Commission européenne a mandaté trois autorités européennes de supervision dites ESAs (EBA pour le secteur bancaire, ESMA pour les marchés financiers et EIOPA pour les assurances) afin de lui fournir des informations sur les risques d’écoblanchiment ou « greenwashing ».

L'objectif est de définir une approche commune de lutte contre les pratiques d’écoblanchiment des acteurs financiers dans les domaines de la banque, de l’assurance et des marchés financiers, tout en précisant les points d’attention spécifiques à ces trois secteurs

Le risque de contrepartie dans le viseur de la BCE

Dans une introduction assez paradoxale, la supervision bancaire de la BCE semble mettre en relation de « cause à effet » la politique de taux bas menée par la banque centrale au cours des quinze dernières années et l’émergence d’une « bulle » dans les activités de services aux contreparties non financières, qu’elle estime associées à un surcroit de risque et d’opacité, comme les hedge funds ou les family offices.

En effet, sans les taux d’intérêts négatifs ou nuls, le développement des activités de prime brokerage et ou de delta one au sein des banques, d’une rentabilité brute epsilonesque et d’une rentabilité après prise en compte des risques encore plus infinitésimale, n’auraient jamais eu l’essor constaté.

Le seconde remarque que semble faire la BCE est celui de l’impuissance du cadre réglementaire mis en œuvre depuis la faillite du fonds LTCM, dont elle nous dresse l’inventaire par le menu, à empêcher la faillite bancaire d’un acteur majeur pour cause d’excès de concentration de risques de crédit de contrepartie - l’exposition excessive à Archegos Capital Management étant identifiée comme étant à l’origine de la faillite de Crédit Suisse.

BCBS 239 : 7 ans plus tard, une consultation pour relancer le projet et la maitrise des risques ?

En juillet 2023, la Banque Centrale Européenne (BCE) a lancé, et jusqu’au 6 octobre 2023, une consultation auprès des établissements de la place pour apporter des observations sur le guide relatif à l’agrégation efficace des données sur les risques et la communication des données sur les risques. Il vient compléter les principes aux fins de l’agrégation des données sur les risques et de la notification des risques, plus connus sous le nom de BCBS 239.

Cette norme du Comité de Bâle est la résultante de la crise financière de 2007 ; en outre, cette dernière avait illustré que les systèmes d’information et les architectures de données des établissements de la place n’étaient pas adaptés à une gestion efficace des risques financiers.

La mise en application de BCBS 239 avait entrainé des travaux sur l’agrégation et la traçabilité des données dans les grandes banques ; malgré cela, la BCE n’a pas noté d’avancée suffisamment significative dans le respect des principes de BCBS, et avait déjà adressé en 2019 à toutes les banques placées sous le mécanisme de Supervision Unique (MSU) une lettre pour les inciter à opérer des travaux de mise en conformité avec les principes du BCBS.

Considérant que les progrès opérés en la matière n’ayant pas été jugés assez conséquents, le sujet est inscrit comme une vulnérabilité critique par la BCE dans son planning des priorités prudentielles pour la période 2023-2025

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