Newsletter Legal & Tax Alert #14

Newsletter Legal & Tax Alert #14 | Septembre 2023
Nous sommes ravis de vous faire partager notre Lettre Juridique et Fiscale, qui reprend les points clefs de l’actualité législative et jurisprudentielle du mois de septembre. Vous y retrouverez notamment des informations sur les propositions de Directives "BEFIT" et "Prix de Transfert", la notion de subvention publique pour le calcul du CIR, le traitement TVA des offres composites et bien d’autres sujets encore…

Brève | Publication le 12 septembre 2023 d’une proposition de Directive « BEFIT » et d’une proposition de Directive « Prix de Transfert »

Par Frédéric Barat, Yaël Chiche et Jérôme Labrousse, Avocats Associés , Coralie Crespin Avocate Manager, Sami Orfani et Christophe Igonenc | Mazars Société d'Avocats

Le 12 septembre 2023, la Commission Européenne a publié deux propositions de Directives qui devront maintenant faire l’objet de discussions au sein des 27 Etats membres. Si celles-ci font ultérieurement l’objet d’une adoption par le Conseil Européen, statuant à l’unanimité, leur entrée en vigueur pourrait être fixée au 1er juillet 2028 concernant la Directive BEFIT et au 1er janvier 2026 concernant la Directive Prix de Transfert.

La proposition de Directive BEFIT (« Business in Europe : Framework for Income Taxation » ou « Entreprises en Europe : cadre pour l’imposition des revenus ») concerne l’imposition des résultats des entreprises dans l’UE, en remplacement du Projet ACCIS.

Cette réforme majeure, portée par la Commission européenne, prévoit un corpus unique de règles en matière d’impôt sur les sociétés au sein de l’UE reposant sur :

  • des règles communes pour déterminer une base d'imposition au niveau de chaque entité membre du groupe BEFIT,
  • une agrégation des bénéfices et des pertes de toutes les entités du groupe BEFIT afin de déterminer une base d’imposition commune,
  • une affectation à chaque membre du groupe BEFIT d’un pourcentage de cette base imposable commune, et
  • l’imposition par chaque Etat membre des bénéfices imposables qui lui sont alloués en appliquant le taux d’imposition prévu par son droit interne.

En ce qui concerne le champ d’application de la proposition de Directive BEFIT, son application serait obligatoire pour les groupes dont le chiffre d’affaires mondial consolidé atteint ou dépasse les 750 m€, et dont l'entité mère ultime détient, directement ou indirectement, au moins 75 % des droits de propriété ou des droits financiers.

Les groupes qui n’atteindraient pas le seuil des 750 m€ pourraient néanmoins opter pour ce régime, à la condition qu’ils établissent des états financiers consolidés.

Enfin, pour les groupes ayant leur siège dans des pays tiers, leurs membres dans l'UE devront avoir généré (i) au moins 50 m€ de recettes cumulées annuelles au cours d'au moins 2 des 4 derniers exercices ou (ii) au moins 5 % des recettes totales du groupe, afin de pouvoir appliquer ce régime.

Il convient de noter par ailleurs que la Commission n’a prévu aucune exception sectorielle mais que des aménagements pour certains secteurs d’activité, comme les transports internationaux, le transport maritime et les industries extractives sont toutefois prévus.

Concernant la détermination de la base d’imposition, l’apport majeur de la réforme proposée réside dans la détermination de la base imposable de chaque entité (sociétés résidentes ou établissements stables européens) membre d’un même groupe, selon un ensemble commun de règles fiscales.

Le point de départ du calcul demeurerait les états financiers afin de s’aligner sur les règles de Pilier 2.

Les ajustements fiscaux subséquents feraient partie d’un ensemble commun de règles européennes applicables quelle que soit la résidence de l’entité tête du groupe (ex : exclusion de 95% du montant des dividendes mère-fille et des plus-values sur certaines cessions de titres, exclusion des revenus des établissements stables non UE, non déductibilité des amendes et pénalités, de l’impôt sur les sociétés, règles communes concernant l’amortissement des actifs, etc.).

Toutes ces assiettes fiscales seraient ensuite agrégées en une seule « base imposable commune », permettant ainsi une compensation effective des pertes transfrontières. En revanche, les bénéfices et les pertes des parties liées qui ne font pas partie du groupe BEFIT (e.g., car non UE) ne seraient pas agrégés dans l'assiette imposable du groupe BEFIT.

En ce qui concerne la répartition des bénéfices entre les sociétés membres du groupe BEFIT, la proposition de Directive est clairement moins ambitieuse que le projet initial qui retenait la notion de création de valeur. Dans le texte proposé par la Commission, une règle de répartition transitoire serait instaurée de 2028 à 2035 selon laquelle chaque entité du groupe se verrait affecter un pourcentage de la base d’imposition commune, calculé sur la base de la moyenne de ses résultats imposables enregistrés au cours des trois derniers exercices. Des règles spécifiques préciseraient par ailleurs la mise en œuvre de cette règle les 3 premières années d’application du régime.

Au final, cette proposition de Directive peine à convaincre. En premier lieu, cette réforme présentée comme devant notamment réduire la complexité des règles fiscales au sein de l’UE et les coûts actuels de conformité fiscale des entreprises, semble au contraire ajouter des éléments de complexité. De plus, cette réforme ajoute de nouvelles déclarations fiscales à l’arsenal déjà existant : une déclaration fiscale au niveau de la société mère ultime, pour le groupe BEFIT et des déclarations fiscales au niveau des entités membres du groupe auprès de chacune de leurs administrations. Enfin, la répartition de la base taxable selon les résultats des entités du groupe et non selon la création de valeur de chaque entité (en fonction de facteurs comme les actifs corporels, la main d’œuvre, le lieu de consommation des biens et des services, les incorporels) n’est clairement pas satisfaisante, même si l’on peut entendre la justification avancée par la Commission liée à la limitation de l’impact de la réforme sur le budget des Etats membres. En tout état de cause, bien qu’il soit difficile de prévoir à ce stade si le texte de la Proposition de Directive BEFIT pourrait être adopté en l’état, les entreprises qui se trouvent dans le champ de la Directive sont invitées à réaliser les premières simulations afin de pouvoir anticiper les effets d’une telle réforme sur leurs résultats.

Concernant la proposition de Directive Prix de Transfert, cette dernière s’inscrit dans un cadre où presque l’ensemble des États membres se sont engagés à suivre les principes et les recommandations de l'OCDE. Pour autant, il n’existe aucune harmonisation au sein de l’UE.

Cette proposition de Directive a donc pour principal objectif d’harmoniser au sein de l’UE l'application des principes de l’OCDE en matière de prix de transfert en leur donnant une valeur coercitive dans le cadre de leur transposition par les Etats membres.

Ainsi, ces principes pourront acquérir une force contraignante et renforcer la sécurité juridique tout en réduisant le risque de litige ou de double imposition.

Les principales mesures portées par la proposition de Directive concernent :

Une définition commune du principe de pleine concurrence,

Une définition commune de la notion « d’entreprises associées » avec l’application d’un seuil commun de 25%,

Un mécanisme commun pour les ajustements : lorsqu’un ajustement est effectué dans un Etat membre impliqué dans une transaction intragroupe, le second Etat membre doit procéder à un ajustement corrélatif afin d’éviter la double imposition. L’ajustement serait admis à condition que le prix initial soit fixé en dehors de l’intervalle interquartile.

L’admission par les Etats membres de l’ajustement de fin d’exercice effectué par une entité sous les conditions que cette dernière :

  • Démontre que tous les moyens ont été employés pour atteindre l’intervalle de pleine concurrence,
  • Applique l’ajustement de fin d’exercice avant le dépôt de la déclaration d’impôt sur les sociétés,
  • Justifie la raison pour laquelle le résultat initial se situe en dehors de l’intervalle de pleine concurrence.

 

Brève | Le Conseil d’Etat précise la notion de subvention publique pour le calcul du CIR.

CE, 9e et 10e ch., 12 juill. 2023, n° 463363, Institut Forêt cellulose bois-construction ameublement (FCBA)

Par Anne Sophie Palacin, Avocate Manager | Mazars Société d'Avocats

Dans un arrêt du 12 juillet 2023, le Conseil d’Etat a précisé le sens de la notion de « subvention publique » pour l’application du III de l’article 244 quater B du CGI. Cette précision inédite retient qu’une subvention publique est constitué de « toute aide versée à raison d’opérations ouvrant droit au crédit d’impôt par une personne morale de droit public ».

Cette définition s’écarte du critère organique lié aux fonds utilisés (au cas d’espèce versement par un organisme privé investi d’une mission de service public) et marque une distinction entre subvention publique et aide publique. Enfin, elle réserve ainsi la qualification des subventions publiques aux aides versées par une personne morale de droit public. La décision susvisée sera publiée au recueil Lebon.

  

Brève | TVA, des clarifications apportées par l’administration fiscale en matière d’offres composites  

Par Pauline Girard, Avocate Manager | Mazars Société d'Avocats

L’administration fiscale vient de mettre à jour ses commentaires concernant le traitement TVA des offres composites. Sont ainsi créées quatre nouvelles subdivisions au sein du site Bofip.Impôts reprenant les définitions applicables, la méthode d’analyse, l’identification du régime et les cas spécifiques, et une annexe qui répertorie les décisions de la cour de justice de l’union européenne. 

La doctrine propre à certains secteurs d'activité est également mise à jour.  

Ces précisions étaient particulièrement attendues par les opérateurs commercialisant des prestations annexes aux biens vendus ou services prestés, telles que des offres de financement ou d’assurance. 

Une consultation publique est ouverte aux entreprises jusqu’au 31 janvier 2024 pour formuler leurs remarques.