Newsletter Legal & Tax Alert #4

Newsletter Legal & Tax Alert #4 | Octobre 2022
Ce mois-ci, retrouvez deux articles portant sur les lignes directrices relatives au contrôle des investissements étrangers en France et sur la déduction de la TVA par une holding. Visionner également le replay du webinar sur la facturation électronique.

Brève |Remboursement de la TVA facturée à tort – Procédure de répétition de l’indu

Par Elise Pottier, Avocate | Mazars Société d’Avocats

Par huit arrêts en date du 22 septembre 2022, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé qu’une clinique était susceptible de bénéficier du remboursement de TVA facturés à tort par son prestataire au travers du mécanisme de répétition de l’indu, à défaut d’accord amiable entre les parties. En l’espèce, l’Etablissement français du sang avait facturé des produits sanguins labiles en appliquant un taux de TVA de 2,1%. Par un arrêt C-412/15 du 5 octobre 2016, la Cour de Justice de l’Union Européenne avait jugé que de tels produits devaient relever de l’exonération de TVA. L’Etablissement français du sang refusait toutefois le remboursement de la TVA correspondante aux différentes cliniques.

Cette décision inédite ouvre ainsi une ultime possibilité de recours pour les entreprises en cas de rejet de la déductibilité de TVA facturée par leur fournisseur (CAA Marseille, 2ème chambre, 22 septembre 2022, n°21MA02493, 21MA02492, 21MA01489, 21MA01488, 21MA01487, 21MA01486, 21MA01485, 21MA01484).

 

Brève | L’efficacité d’une clause d’agrément statutaire portant sur les titres d’une société en liquidation judiciaire (CA Aix-en-Provence 7/4/2022)

Par Caroline Devoucoux, Avocate Associée, et Attilio Arango, Avocat | Mazars Société d’Avocats

L’agrément est une procédure destinée à permettre aux associés en place de « filtrer » l’entrée de nouveaux associés lors d’un projet de cession de ses titres. Lorsque l’associé détenteur des titres fait l’objet d’une procédure collective, se pose la question de savoir si la clause ou la procédure d’agrément doit être respectée par le liquidateur.

En l’espèce, une société en liquidation judiciaire détenait une participation dans une filiale, dont les titres faisaient l’objet d’offres de reprise. Les statuts de cette filiale contenaient un agrément légal unanime des membres du conseil d’administration[1]. L’agrément ayant été refusé au repreneur, le liquidateur a demandé en référé la suspension de la clause d’agrément.

La Cour[2] a donné pleine efficacité à ladite clause d’agrément. Selon la doctrine, dans le cadre d’un plan global de cession de l’entreprise, seuls les titres considérés comme indispensables à la poursuite de l’activité de l’entreprise pourraient permettre au tribunal d’écarter le jeu des clauses d’agrément applicables auxdits titres[3], preuve néanmoins généralement difficile à rapporter.

[1] Loi n° 86-897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse.

[2] CA Aix-en-Provence 7-4-2022 n° 22/00785 et 22/03156 à 21/18274.

[3] Guide des pactes d’actionnaires et d’associés, 22/23, Lexisnexis, § 128

Brève | De la valeur d’une garantie d’actif et de passif stipulée au moment de pourparlers mais non reprise dans les actes de cession définitifs (CA Paris 05/07/2022)

Par Caroline Devoucoux, Avocate Associée, et Benjamin Levy, Avocat | Mazars Société d’Avocats

Dans l’affaire soumise à la Cour d’Appel, un protocole d’accord avait été conclu le 5 novembre 2015 et prévoyait à son article 8 la future conclusion d’une convention de « garantie d’actif et de passif », avant le 15 juin 2016 et dont les principales caractéristiques étaient définies.

En suite de ce protocole, les parties ont finalement conclu une convention de cession le 23 décembre 2015. Cette dernière ne contenait pas de garantie d’actif et de passif et aucune convention distincte ayant le même objet n’a été versée aux débats.

La Cour d’Appel de Paris[1] n’a pas manqué de préciser que le protocole d’accord du 05 novembre 2015 « ne constituait qu’un document préparatoire à la cession et ne vaut pas engagement de garantir le passif », d’autant plus que « ce protocole n’indique pas sur quoi doit porter la garantie de passif ». Ce dernier point vient rappeler le caractère nécessairement exprès de la garantie de passif[2], cette dernière ne se présumant pas et ne pouvant résulter ni du silence de l’acte, ni des termes ambigus d’une clause.

[1] CA Paris, pôle 5, ch. 8, 5 juill. 2022, n° 20/11904.

[2] Cass. com. 23-4-1985 : Bull. Joly 1985 p. 791.

Brève | Exclusion dans une Société d’Exercice Libéral (SEL) du secteur de la santé : Clause statutaire irrégulière (Cass. com., 21/04/2022)

Par Caroline Devoucoux, Avocate Associée, et Alan Boutine | Mazars Société d’Avocats

La chambre commerciale de la Cour de cassation a, le 21 avril 2022, jugé comme irrégulière une clause des statuts d’une SEL de médecins prévoyant qu’un associé pouvait être exclu par une décision prise « par les associés […] calculée en excluant, […] l’intéressé, […] »[1].

La décision semble logique, dans le sens où elle ne fait que réitérer une jurisprudence constante depuis le célèbre arrêt Château d’Yquem[2] rappelant régulièrement que les statuts ne peuvent instituer une suppression du droit de vote de l'associé qui n'aurait pas été prévue par la loi.

La décision peut toutefois surprendre puisque la clause statutaire ne faisait que reproduire le texte règlementaire spécifique aux SEL de médecins[3].

Ces dispositions règlementaires seraient-elles donc illégales ? Les commentateurs ne s’accordent pas sur la question. Une chose est certaine, ce type de clause figure toujours actuellement dans les modèles de statuts proposés par l’Ordre des médecins[4]. Le débat reste donc ouvert, espérons que le sujet sera tranché rapidement par un nouvel arrêt clair et publié au bulletin.

[1] Cass. com., 21 avr. 2022, n° 20-20.619

[2] Cass. com., 9 févr. 1999, n° 96-17.661

[3] Article R4113-16 du Code de la santé publique

[4] Statuts types de Selarl de médecins approuvés par le Conseil national de l’ordre des médecins, version du 17-6-2011, art. 14

Brève | Abus de droit fiscal : L’Administration qui modifie la catégorie d’imposition des produits litigieux en cours de procédure ne prive pas le contribuable de ses garanties

Par Paola Garzia, Fiscaliste, Doctorante | Mazars Société d’Avocats

En raison des majorations importantes qu’elle peut induire (80% ou 40% selon les cas), la procédure de l’abus de droit fiscal accorde au contribuable redressé certaines garanties comme celle de pouvoir saisir le Comité de l’abus de droit fiscal.

Au cas d’espèce, une société mère française été poursuivis pour abus de droit fiscal à raison d’un montage artificiel qu’elle avait réalisé aux fins de déguiser une pension de titres en produits de participation, abusant ainsi du régime mère-fille.

La société requérante reprochait au fisc d’avoir soutenu pour la première fois en appel qu'une fois les actes constitutifs d'abus de droit écartés, les sommes imposées revêtaient une qualification différente de celle qu'elle avait initialement retenue (dividendes dans un premier temps, puis revenus de créances dans un second). Une telle substitution de motifs selon la requérante l’aurait privé de la garantie attachée à la saisine du Comité de l’abus de droit fiscal.

Le Conseil d’Etat* rejeta l’argumentaire en avançant que le contribuable n’avait à aucun moment été privé de sa faculté de saisir l’organe consultatif ; que l’Administration n’avait à aucun moment sollicité une substitution de motifs en qualifiant ces faits de montage d’artificiel.

En résumé, la circonstance que le fisc, dans la partie aval de son raisonnement, modifie la qualification donnée aux revenus en cause, ne prive pas le contribuable de la garantie de saisir le Comité de l’abus de droit fiscal dès lors que dans un cas comme dans l'autre, le raisonnement en amont relatif à la qualification du montage artificiel (objet et nature du montage ; actes écartés) demeure inchangé.

* Source : Conseil d’État, 8e et 3e ch., 31 mai 2022, n° 453175, SE Dassault Systèmes

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