Flash BankNews n°52 - FRTB : un cadre prudentiel désormais stabilisé

Près de trois années après la parution de la version initiale de son document « minimum requirements for market risk », le Comité de Bâle vient d’adopter une modification de ce texte dans le prolongement de la consultation publique lancée en mars 2018 laquelle portait sur des propositions de révisions ciblées du standard de janvier 2016. Pour mémoire le texte initial, produit dans le cadre de la revue fondamentale du portefeuille de négociation (FRTB), avait nécessité près de 4 ans de discussions. Il aura donc fallu au total 7 ans pour revoir en profondeur le cadre prudentiel de calcul des exigences en fonds propres (EFP) pour risques de marché.

Ainsi la norme a été révisée pour traiter les problèmes que le Comité de Bâle a identifié lors du suivi de l’implémentation de FRTB et de son impact en termes d’augmentation des exigences de fonds propres dans le cadre du Basel III monitoring exercise à fin décembre 2017. D’après le Comité cette révision de FRTB ramènera désormais l’augmentation des EFP à en moyenne 22%, et non plus 40% avec FRTB version 2016, par rapport à Bâle 2.5. La part des actifs pondérés par le risque (RWA) attribuable au risque de marché reste faible, à environ 5% du total des RWA. Les grandes lignes de la réforme des risques marché n’ont à cette occasion pas été remis en cause.

Pour rappel FRTB prévoit :

  • une définition plus prescriptive du trading book et donc par conséquent du banking book afin d’éviter les arbitrages réglementaires entre portefeuilles;
  • une nouvelle approche modèles internes (IMA – Internal Model Approach) qui cherche à : (i) mieux capter les risques de queue de distribution de chaque classe de risque de marché via le recours à des modèles d’Expected Shortfall, (ii) mieux capter le risque de défaut des expositions crédit et actions, (iii) capitaliser de manière séparée les expositions soumises à des facteurs de risque jugés non modélisables (NMRF – Non modelable risk factors). Les banques devront faire valider l’ensemble des nouveaux modèles pour chaque trading desk éligible ;
  • une nouvelle approche standard (SA – Standardised approach), dont la sensibilité aux risques a considérablement augmenté par rapport à Bâle I, permettant la réutilisation des données internes sur les sensibilités des expositions aux facteurs de risques, et calibrée de façon à constituer une méthode alternative crédible à l’IMA. Une charge pour risque de défaut est également introduite (DRC – default risk charge), ainsi que pour les risques liés à produits non vanilles (RRAO – residual risk add-on).

Les principales révisions apportées à l'ensemble du texte

Approche standard simplifiée

Suite aux inquiétudes exprimées par les banques n’ayant que peu d’activités de trading et pas de calculs de sensibilités, une approche standard simplifiée a été introduite. Celle-ci repose sur une majoration des exigences calculées à partir des méthodes actuelles, en vigueur via CRR.

Risk class

Scalaire sur Bâle 2.5

General & specific IR risk

1,3

General & specific Equity risk

3,5

Commodity

1,9

Forex

1,2

Refonte du PLA test

Le test d’attribution des pertes et profits (PLAT – Profit and loss attribution test) a été indroduit pour déterminer si le modèle interne mesure de manière exhaustive les risques qui guident le P&L d’un trading desk. Sa réussite est l’une des conditions à remplir pour qu’un trading desk puisse utiliser IMA pour le calcul de ses EFP. Dans sa version initiale l’industrie avait exprimé son inquiétude quant au risque de voir de nombreux desks basculer en approche standard. Ainsi le Comité de Bâle a introduit une zone intermédiaire (amber), qui permet de demeurer temporairement en IMA, et a calibré les seuils des différents tests (Spearman pour la corrélation et Kolmogorov-Smirnov pour la similarité des distributions) de manière à réduire la probabilité de se retrouver en zone rouge.

Refonte du PLA test

Refonte du RFET (Risk factor eligibility test)

Autre sujet de préoccupation majeur de l’industrie, le calcul des EFP pour NMRF. Compte tenu des difficultés techniques induites par les propositions initiales de Bâle sur le caractère modélisable de certains facteurs de risques, et donc marginalisant l’intérêt de l’IMA, le RFET a été assoupli. Cela vise notamment des expositions suffisamment liquides mais qui verraient des périodes de trading limitées en raison d’activité saisonnière. Désormais il faudra au moins 4 prix observables au cours d’une période de 90 jours, et non plus 1 observation minimum par mois. En cas non-respect, le facteur de risque demeurera modélisable à condition qu’au cours des 12 précédents mois, au moins 100 prix quotidiens auront pu être observés.

Recalibrage de la SA

Le Comité a également revu certains éléments de l’approche basée sur les sensibilités (SBA – sentivities based approach). Le traitement des paires de devises très liquides a été élargi de manière à inclure également des paires considérées comme la combinaison de deux paires très liquides. Les pondérations réglementaires des classes taux d’intérêt et change ont été réduites, et le scénario à corrélation faible revu aux fins de l’agrégation des sensibilités pondérées. En outre des modifications ont été apportées au calcul de la charge de capital pour risque de courbure.

Clarification de la définition du trading book

Enfin, bien que les grandes évolutions aient été introduites dans FRTB 2016, certaines précisions ont été apportées dans la version 2019 afin de clarifier le traitement de certains instruments qui pouvaient faire l’objet à la fois d’une présomption et d’une prescription d’inclusion au trading book. Le traitement des détentions de parts de fonds a par ailleurs été explicité.

La mise en œuvre dans l'Union européenne

Au vu de l’ampleur des changements à opérer au niveau des modèles, et du temps nécessaire à leur homologation, il est clairement apparu que la date initiale de mise en œuvre de 2019 était irréaliste. Ainsi le Comité préconise d’aligner la date de mise en œuvre avec celles des autres réformes publiées en décembre 2017, i.e. au 1er janvier 2022. Au plan Européen, les nouvelles méthodes introduites par le texte de 2016 sont intégrées au paquet législatif CRR 2 – CRD 5, et serviront à l’alimentation d’un reporting prudentiel intermédiaire dans l’attente d’une introduction complète et contraignante de FRTB via un futur CRR 3. Les évolutions apportées par FRTB 2019 seraient introduites dans un acte délégué, complémentaire à CRR 2.

NB : Le texte a été publié dans un nouveau format modulaire qui sera généralisé à toutes ses normes au cours des prochains mois. Le standard est disponible en deux versions : une version qui inclut les questions fréquemment posées précédemment publiées (FAQ) et une version sans les FAQ associées.

Pour aller plus loin : 

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