La réforme tant attendue du crédit d’impôt jeu vidéo sera-t-elle à la hauteur des attentes du secteur ?

Le 24 juin 2022 |
L’annonce d’un accord sur la réforme du crédit d’impôt jeu vidéo en début d’année était très attendue par les acteurs du secteur. Les contours de cette dernière et sa mise en œuvre restent cependant à préciser dans un contexte où le crédit d’impôt tend à ne plus être adapté et à être de moins en moins inclusif au regard du développement du secteur.

Une nouvelle réforme nécessaire

Ce dispositif fiscal en faveur du secteur permet aux entreprises de création de jeux vidéo soumises à l’impôt sur les sociétés de bénéficier d’un crédit d’impôt correspondant à 30% du montant de certains coûts de développement.

Instauré en 2008 et codifié à l’article 220 terdecies du code général des impôts, ce dispositif fait depuis plusieurs années l’objet de demandes d’évolution notamment quant à son champ d’application restreint au regard des conditions même du régime (notamment au sujet des délais d’agrément des jeux ou de l’exclusion des jeux PEGI18). C’est pourquoi de premières mesures ont été prises dès 2014.

Plus récemment, en 2017, le taux du crédit d’impôt a été relevé de 20% à 30%. Le montant du plafond annuel par entreprise et des dépenses de sous-traitance admises a pour sa part été doublé : de 3 à 6 millions d’euros pour le premier, de 1 à 2 millions d’euros pour le second.

Cependant s’agissant d’un secteur en constante évolution, une nouvelle réforme s’avère nécessaire pour les acteurs du marché. En effet, l’élargissement des activités de développement des studios de développement, notamment sur le secteur mobile tend à rendre nécessaire une évolution des critères artistiques et culturels retenus pour l’éligibilité des dépenses de développement au crédit d’impôt.

Inclure plus de projets dans le dispositif

A ce jour, les jeux éligibles sont ceux destinés à un public d’adultes (hors jeux comportant des séquences à caractère pornographique ou de très grande violence, susceptibles de nuire gravement à l’épanouissement physique, mental ou moral des utilisateurs). Les jeux doivent être commercialisés comme tels et ouvrent droit au crédit d’impôt dès lors que leur contribution au développement et à la diversité de la création française et européenne en matière de jeux vidéo présente un niveau particulièrement significatif.

Ces précisions, reprises dans la doctrine administrative (BOI-IS-RICI-10-50), visent ici le Code du cinéma et de l’image animée. Parmi les conditions d’application du régime, le jeu doit bénéficier d’un agrément du CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée). La demande d’agrément repose sur des critères de sélection restrictifs (notamment la création d’origine patrimoniale et l’importance du critère de la narration), ce qui tend à exclure un certain nombre de jeux et de studios de développement du dispositif.

L’objectif ainsi affiché de la réforme est d’inclure plus de projets dans le dispositif, notamment en l’élargissant aux créations originales et en diminuant le poids accordé à la narration au profit de la direction artistique. Les éditeurs de jeux sur mobile et indépendants pourraient ainsi bénéficier de ce dispositif dont ils sont aujourd’hui exclus.

Cette réforme annoncée en début d’année 2022 par le cabinet du secrétaire d’Etat chargé de la Transition numérique et des Communications électroniques, Cédric O, résulte de discussions avec le Syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs (Sell) et le Syndicat national du jeu vidéo (SNJV).

Le calendrier de sa mise en œuvre reste cependant incertain compte tenu des modalités de mise en œuvre d’une telle réforme sectorielle. Cette dernière devra avant tout être notifiée à la Commission européenne avant de pouvoir être introduite dans notre droit. Quelle forme prendra-t-elle ? A ce jour, rien n’est certain, si ce n’est que le dispositif actuel est censé prendre fin au 31 décembre 2022.

Auteur

Anne-Sophie Palacin
Anne-Sophie Palacin Associée – Mazars Société d’Avocats, Fiscalité Paris

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