Révéler les opportunités de "croissance verte" dans le secteur automobile

Le secteur automobile accélère sa transition verte et travaille à réduire ses émissions pour devenir plus responsable et répondre aux exigences réglementaires. Cette dynamique ouvre des opportunités commerciales (et réputationnelles) pour les constructeurs automobiles et tout leur écosystème, notamment s'ils y voient l’occasion d’améliorer leur responsabilité environnementale, leur image et leur tarification.

Selon l'Agence internationale de l'énergie, plus de 2,1 millions de voitures électriques ont été vendues dans le monde en 2019, soit une augmentation de 6 % par rapport à l'année précédente.

Le tout à chacun achète et achètera demain des véhicules électriques mais, comme tout consommateur, il a tendance à privilégier le prix par rapport à l'impact environnemental. Or les véhicules électriques sont toujours significativement plus chers que leurs homologues conventionnels. Alors, qui peut rendre les véhicules écologiques plus abordables ? Les constructeurs (OEM) doivent relever leur propre défi, et se conformer aux exigences légales tout en répondant aux demandes des consommateurs et en assurant une production rentable. S'ils parviennent à trouver des moyens de réduire les prix et rendre les véhicules écologiques, ils répondront aux attentes réglementaires et sociétales tout en créant des opportunités de "croissance verte".

L’impact de la pression des pouvoirs publics

A l’échelle mondiale, les constructeurs automobile font face à une vraie pression gouvernementale pour rendre les flottes automobiles plus propres et plus efficaces, explique Christian Back, co-responsable mondial du secteur automobile chez Mazars. En Europe en particulier, "les exigences sont de plus en plus strictes et les directives  sont claires. " Il ajoute : "La réglementation européenne exige des équipementiers qu'ils réduisent les émissions à 95 grammes par kilomètre en moyenne, ces derniers sont donc soumis à une forte pression pour mettre leurs parcs en conformité et éviter les amendes.

Dans les autres régions du monde, "la Chine répond à cette aspiration de 95 grammes par kilomètre. Bien que l'échéance de 2025 soit plus confortable", déclare Jean-François Salzmann, Associé de Mazars en Chine continentale. Au Brésil, "un programme national de biodiesel encourage l'utilisation des biocarburants dans le mélange énergétique national pour remplacer le diesel automobile", selon Franciane Moraes, Senior Manager Mazars au Brésil.

Si les mesures publiques incitatives peuvent varier d'un pays à l'autre, le consensus et la marche vers des opérations plus durables est claire. "Toutefois, le règlement européen susmentionné ne tient pas compte de la pollution réelle de l'environnement", déclare M. Back. "Les objectifs visés en matière de protection de l'environnement ont déjà été atteints car la crise de la Covid-19 a permis une réduction significative des émissions. Avec la diminution du nombre de kilomètres parcourus dans le monde, il ne devrait y avoir aucune raison d'obliger les équipementiers à payer des amendes pour des émissions non rejetées . Du moins, pas en 2020. Mais rien n'indique que l'UE libérera les équipementiers de cet engagement, même pour un an ou deux".

Saisir les opportunités à chaque étape de la chaîne

Les entreprises se doivent de saisir le potentiel d'innovation et de croissance, à mesure que les pressions réglementaires et politiques s'alignent sur la demande naissante des consommateurs.

Réduire les émissions provenant de la production et de la chaîne d'approvisionnement

La plupart des constructeurs automobile ont des plans pour réduire l’impact carbone de leur production de voitures : Volvo, par exemple, s'est engagé à atteindre la neutralité carbone d'ici 2040, non seulement pour ses véhicules, mais aussi pour son réseau de fabrication et ses activités. D'autres grands constructeurs suivent cet exemple faisant preuve d’engagements similaires, notamment Daimler, Volkswagen, Toyota et Ford. "Ils démontrent qu'ils sont impliqués et sérieux face aux enjeux environnementaux et climatiques », déclare C. Back. Les entreprises se différencient en faisant preuve de leadership et en prenant des engagements audacieux, non seulement pour leurs activités mais aussi pour l'ensemble de leur chaîne d'approvisionnement.

Des véhicules plus légers, moins d'essence

La recherche de l'efficacité énergétique est un défi que les constructeurs connaissent bien, il s’agit principalement de trouver des moyens d'alléger les véhicules et de réduire leur consommation de carburant. Le plan "Made in China 2025" et le plan de développement à moyen et long terme de l'industrie automobile mettent l'accent sur l'allègement, grâce à l'utilisation de nouveaux matériaux composites et à la réduction de la consommation de carburant pour le marché chinois, ainsi que sur le développement de véhicules à énergie nouvelle, explique JF. Salzmann. Dans le monde entier, les entreprises examinent chaque composant d'un véhicule, des phares aux pneus, pour trouver comment réduire au maximum la consommation de carburant. 

L'écologisation du front office et du service après-vente

Autre tendance cette fois liée à la crise sanitaire, la potentielle accélération des achats de voitures par voie numérique plutôt qu'en showrooms, note M. Moraes : "Les entreprises sont conscientes du potentiel des ventes en ligne, qui simplifie les contacts entre les clients et les concessionnaires". Moins de salles d'exposition fortement éclairées, pour une empreinte carbone plus faible. De plus, le passage aux canaux numériques présente l’avantage pour les acheteurs d’avoir directement accès à la palette de personnalisation, plutôt qu'un argumentaire de vente en personne. "Audi et Porsche proposent déjà des plateformes en ligne et ont vendu des centaines d'unités par ce biais", explique C. Back. "Il existe de vraies opportunités de marché pour les constructeurs et les distributeurs qui personnalisent leurs plateformes en ligne de manière à servir au mieux les clients".

Accélérer la demande de voitures plus durables

Les constructeurs sont au premier plan pour convaincre les acheteurs de l’intérêt et de la valeur à long terme d'un produit éco-responsable, surtout lorsque les clients sont freinés par un prix élevé. "Il est essentiel pour les constructeurs d'orienter leurs stratégies de communication vers le climat et l’environnement afin de sensibiliser ses clients et ses partenaires, de sortir des sentiers battus et de convaincre que leur produit est une évolution vers un monde plus vert ", déclare Grégory Derouet, associé, co-responsable du secteur automobile chez Mazars.

Les équipementiers s'orientent vers les technologies

Les constructeurs (OEM) sont loin d’être les seuls à pouvoir se saisir des opportunités du passage à des modèles plus durables. "Chaque fois que les OEM sont confrontés à un problème", dit M. Back, "ils en transmettent généralement une plus grande partie aux équipementiers. Mais, dans le même temps, ils leurs offrent un soutien pour trouver une solution". Avec l'arrivée des véhicules électriques et de l'automatisation, il y a fort à parier que les parcs de véhicules soient profondément remaniés.

"Les équipementiers doivent agir rapidement pour passer d'un état d'esprit manufacturier à un état d'esprit technologique", déclare Jeremy Rice, Associé Mazars. "L'avenir de l'industrie manufacturière sera moins dans les pièces, mais plus vers la technologie. Il ne suffit pas de recruter des ingénieurs pour devenir une entreprise technologique. Les équipementiers doivent se montrer proactifs, se diversifier, se porter acquéreur de jeunes entreprises qui feront d’eux des leaders plutôt que de simplement réagir aux événements.

En réalité c’est une approche que les équipementiers adoptent déjà. "Progressivement, ils développent d'autres activités", explique M. Salzmann. "Un grand fournisseur de systèmes d'échappement, Faurecia, développe maintenant un secteur d'activité propre à la mobilité durable. Ils ont acheté des sociétés de technologie pour faire leur transition.

La demande de « véhicules verts » se fera certainement encore attendre, mais c’est une opportunité à saisir dès maintenant. Ce qu’il semble manquer pour accélérer l'intérêt des clients, c'est le consensus de l'ensemble de la chaine de valeur automobile pour contribuer à faire baisser les prix, et à rendre les véhicules écologiques plus abordables. Ce faisant, les équipementiers, les constructeurs et les distributeurs s’assureront des débouchés commerciaux « écologiques », tout en renforçant la crédibilité du secteur dans son ensemble en matière de développement durable.