Protection sociale du dirigeant : « Devine si tu peux. Choisis si tu l’oses ».

Il existe deux types de protection sociale pour le dirigeant. Grâce à l’évolution du droit des sociétés, le choix du type de protection sociale n’influence plus le pourcentage de détention du dirigeant dans le capital social de sa société. Le choix du type de protection sociale est désormais basé exclusivement sur l’équation santé – coût – assurances complémentaires.

Le choix du type de protection sociale fut un problème cornélien. Corneille disait en effet : « Devine si tu peux. Choisis si tu l’oses ». Suite aux nombreuses réformes du droit des sociétés que nous avons connues ces dix dernières années, le choix de la protection sociale du dirigeant est moins difficile.

Régime général et TNS

En France, il existe deux types de protection sociale :

« Régime général »

« TNS » (Travailleur Non Salarié)

Le régime général est le régime qui s’applique aux salariés. Le dirigeant soumis au « régime général » de la sécurité sociale bénéficie de la même protection sociale qu'un salarié cadre. Mais il n’aura pas droit à l’assurance chômage ;

Il y a encore vingt ans, ce régime était très pénalisant. Le régime TNS ne donne pas, ou très peu, d’indemnités journalières de maladie et de prévoyance. Quant à la retraite, nous savons combien perçoivent les commerçants et artisans retraités aujourd’hui. Bien entendu, le titulaire du régime TNS n’aura pas droit à l’assurance chômage.

Il y a encore quelques années, il était souvent recommandé d’éviter ce régime TNS qui était si effrayant. Le droit des sociétés n’avait pas encore été simplifié. Pour bénéficier du régime général de la sécurité sociale, il n’y avait que deux solutions usuelles : être dirigeant de société anonyme ou être gérant minoritaire de SARL.

Les Présidents et directeurs généraux de SA bénéficient du régime général. Il n’était pas rare de rencontrer des sociétés sous forme de SA avec seulement 150 000 € de chiffre d’affaires ! Car le dirigeant voulait bénéficier d’une protection sociale de type régime général… Il avait alors regroupé sept actionnaires pour un capital global de 37 000 €, 250 000 francs à l’époque. De plus, la nomination d’un commissaire aux comptes était déjà une obligation. La plus-value apportée par le commissaire aux comptes semblait bien difficile à comprendre pour le dirigeant lorsque la société avait déjà un expert-comptable ! Les sept actionnaires n’étaient pas forcément faciles à trouver. Nombre d’entre eux n’avait qu’une action.

Pour éviter d’avoir un capital aussi élevé, pour simplifier le fonctionnement de leur entreprise, certains dirigeants choisissaient la gérance minoritaire de SARL afin obtenir la protection du régime général de la sécurité social. C’est à dire que ses enfants mineurs non émancipés, son  conjoint (ou pacsé) et lui-même ne pouvaient pas détenir globalement plus de 50% des parts sociales de la SARL. Les autres 50% étaient alors détenus par la famille ou des amis. La position de minoritaire pausait de nombreux problèmes. Le dirigeant n’était pas le patron chez lui. Évidemment à la création de la société, les 50% restant était confiés à des associés acquis à sa cause. Mais quelques années plus tard, certaines décisions étaient contestées. La distribution de dividendes, comme la vente de la société relevaient du psychodrame car la moitié de la valeur échappait au foyer du dirigeant.

Le choix du statut

Quelques réformes de droit des sociétés et de la protection sociale plus tard, tous ces problèmes relèvent de l’âge de pierre. Mais ils ne datent que de quelques années !

A ce jour, le créateur qui souhaite une protection sociale de type salarié tout en conservant le pouvoir dans sa société (pour faire simple, la détention de plus de 50% du capital social) a le choix entre une SA et une SAS (société par actions simplifiée). Grâce à la SAS, le dirigeant peut être le seul associé. La SAS n’a pas de capital social minimum. Le commissaire aux comptes est obligatoire seulement après que des seuils assez élevés ont été franchis.

Par contre, si le créateur souhaite une protection sociale de type TNS, une gérance majoritaire de SARL sera la bienvenue. Là aussi, il peut être le seul associé. La SARL n’a pas de capital social minimum. Les seuils de l’obligation d’avoir un commissaire aux comptes restent élevés.

La loi Madelin

Le régime TNS ne s’était pas amélioré entre temps ! Dans les années 90, une avancée importante avait eu lieu grâce à une loi dite « loi Madelin » qui permit à des organismes privés d’assurer le gérant majoritaire de SARL et l’entrepreneur individuel. Ces assurances « loi Madelin » couvrent l’indemnité journalière de maladie, la prévoyance, la mutuelle, la retraite et le chômage en complément du régime de base.

Prises en charges par l’entreprise, les cotisations pour des assurances « loi Madelin » sont déductibles fiscalement jusqu’à des plafonds assez élevés. Mais elles sont soumises aux charges sociales.

Seul bémol, les assureurs distribuant ses produits sont des organismes privés qui ont la liberté d’accepter l’adhésion du dirigeant. Ainsi, les questionnaires de santé, voire les visites médicales par un médecin agréé sont systématiques. En cas de problème de santé, l’assureur refusera l’adhésion. Parfois, en cas de problème de santé détecté, la surprime de l’assurance est tellement importante que le dirigeant y renonce de lui-même. Souvent plus les examens de santé à la souscription du contrat sont pointus et exigeants, plus le rapport qualité-prix de l’assurance est intéressant.

Le dirigeant en « bonne santé », qui choisit avec précision ses assurances de type loi Madelin, obtiendra une protection sociale presque équivalente à celle qu’il aurait eu avec le régime général.

A quel coût ?

Nous démontrons le différentiel de coût avec un calcul très simple.

En SAS ou en SA

En SAS ou en SA

Pour avoir un salaire net de 2 000 €, le coût global pour l’entreprise est de  3 650 € environ, avec l’hypothèse de charge patronale à 42 % du salaire brut.

Un revenu net de gérance de 2 000 € génère un coût global de l’ordre de 2 800 €. Nous avons retenu 40% de charges TNS.

Par ce calcul un peu simpliste, nous con un revenu net de gérance de 2 000 € génère un coût global de l’ordre de 2 800 €. Nous avons retenu 40% de charges TNS. statons donc que le régime TNS est moins cher de 850 € par mois dans ce cas ! Cette économie permet de souscrire à des assurances loi Madelin pour combler les lacunes du régime TNS.

Plus la rémunération est élevée, plus l’écart du coût entre les deux régimes sera important.  Donc, en théorie, plus le régime TNS peut être intéressant. Mais attention toutefois aux plafonds de déduction fiscaux des assurances de type loi Madelin !

Nous pouvons simplifier tout ce qui vient d’être dit en deux phrases :

  • Vous êtes en bonne santé : le régime TNS, et donc la création d’une SARL seront recommandés ;
  • Vous êtes moins certain de votre santé : le régime générale et donc la création d’une SAS sera recommandée.

Nous devons préciser que les assurances « loi Madelin » prennent rarement en charge les arrêts de travail liés à la maternité. J’ai croisé un agent général d’assurances qui parlait de « maladie de l’amour » au sujet de la grossesse. Poète, mais pragmatique lorsqu’il expliquait que la maternité était un acte volontaire donc non assurable au niveau de l’indemnité journalière de maladie.

Bien entendu, il existe de nombreux critères qui peuvent influencer le choix entre les types de protection sociale. Mais le droit des sociétés est à ce jour suffisamment adapté pour ne plus être une contrainte.

La gestion des relations entre les associés de la société reste cependant une question déterminante qui devra être prise en compte dans le choix de la forme sociale de l’entreprise.