Franchiseurs, et si vous pilotiez la valorisation de votre marque ? Par Pierre Beluze et Frédéric Lemonnier
D’une création de valeur financière à un levier d’animation et d’implication
La démarche de valorisation d’une marque répond initialement à des motivations de communication financière et comptable, sinon transactionnelles : préparation d’une transaction, établissement d’un montant initial de redevance prix de transfert, voire estimation d’un préjudice d’image en cas de contrefaçon.
Elle peut également revêtir des conséquences moins connues, mais de première importance s’agissant de l’animation du réseau et la fidélisation des franchisés :
- réajustement sur une base objective du montant des redevances pratiquées : elles traduisent l’effet d’expérience et rémunèrent la survaleur générée par l’affiliation ;
- réassurance des franchisés sur la valeur patrimoniale qu’ils développent aux côtés de l’enseigne : la franchise demeure une affaire d’investissement qui va se réaliser lors de la cession ;
- fédération du réseau sur cette base et de manière durable : loin de de vouloir entrer en conflit ouvert avec leur franchiseur, les affiliés prennent alors conscience de l’intérêt qu’ils ont à « jouer le jeu » du réseau et à, par exemple, suivre les préconisations de leur animateur ;
- caractère « probatoire » auprès des juridictions : en produisant une valeur d’enseigne actualisée, et qui en bonne logique s’apprécie d’année en année, les franchiseurs disposent d’un indice pour caractériser la présence d’un savoir-faire consistant et innovant.
Une nouvelle logique d’accompagnement des enseignes
Ce qui importe surtout, ce n'est pas tant le choix d’une méthode de valorisation (coûts de reconstitution, différentiel de prix, redevances ou relief-from-royalties, ou encore surprofit ou excess-earnings) - qui a sa logique propre en fonction de l’objectif recherché par le réseau ou la nature d’opération dans laquelle s’inscrit l’exercice de valorisation - mais plutôt l’opportunité d’intégrer cette dernière dans un dispositif « piloté ».
A partir du moment où la valorisation excède son rôle d’instrument financier pour devenir un outil de communication et de management du collectif, les têtes de réseau doivent pouvoir disposer d’un moyen d’appréciation de cette génération de valeur. Il s’agit de rendre plus visible le lien de causalité entre l’appréciation financière et l’innovation réalisée sur le concept et son exploitation.
La démarche comprend deux phases : une évaluation initiale, qui établit la valeur de départ de la marque de l’enseigne, et une évaluation annuelle, qui propose une mise à jour chiffrée établissant un lien clair avec les innovations apportées au concept, ainsi que les événements d’exploitation sous-jacents, cela tout au long de l’exercice fiscal. Son intérêt réside plus spécifiquement dans son caractère intégré : l’expert-conseil intervient depuis le recueil des données concernées jusqu’à orienter le franchiseur dans la communication qu’il pourra en faire auprès de sa population franchisée. Cela pose la question du Plan de communication à adopter par ce dernier afin d’exploiter au mieux ces résultats dans ses rapports avec ses affiliés et, d’une certaine manière, « reprendre un peu la main ».
C'est donc bien sur le terrain des modalités d’accompagnement et du conseil que les têtes de réseaux parviendront à piloter véritablement la valorisation de leur marque, afin d’en faire un véritable levier d’animation et de création de valeur extra-financière.
Les auteurs
Pierre Beluze est associé de Mazars à Lyon. Il intervient dans le cadre d’audit de groupes cotés et de sociétés à actionnariat familial. Expert-judiciaire près la Cour d’Appel de Lyon en matière de comptabilité mais également d’évaluation d’entreprises et de droits sociaux, il réalise de nombreuses missions d’évaluation et de "due diligence", tant pour des entreprises que pour des fonds d’investissements ou des franchiseurs.
Frédéric Lemonnier est senior manager au bureau de Lyon et spécialisé depuis plus de 10 ans dans l’évaluation d’entreprise et d’actifs incorporels. Il intervient principalement sur des missions de conseil dans le cadre d’acquisitions, de fusions, d’apports, d’allocation du coût d’acquisition ou de litiges