"Franchise participative : une si bonne idée ?" par Elodie Chevallier

La franchise participative est un dispositif de plus en plus plébiscité par les enseignes. Credit Crunch persistant, concepts en guerre ouverte pour les meilleurs emplacements, barrière capitalistique à l’entrée de certains secteurs (hôtellerie, restauration et distribution alimentaire en tête) : les arguments sont légion pour qu’un franchiseur propose à son candidat franchisé d’intégrer, par une participation minoritaire, le capital de sa société. Si la formule séduit, elle n’en dénature pas moins l’esprit même de la franchise.

Passons en revue ses atouts mais aussi ses limites et les points de vigilance à mettre en lumière, dans l’optique d’éclairer les enseignes et les candidats souhaitant les rejoindre.

Les atouts de la franchise participative

Pour le franchisé, c’est un « supplément d’âme » au projet de financement. Les candidats franchisés n’ayant pas toujours un niveau d’apport suffisant, un renfort de la tête de réseau rend leur demande de prêt nettement plus attractive. Cela est d’autant plus critique dans les secteurs les plus gourmands en capital. Par ailleurs, d’anciens salariés indécis à l’idée de sauter le pas trouveront dans l’actionnariat conjoint un élément de réassurance psychologique pouvant leur manquer.

Côté enseigne, la motivation première est d’accélérer le développement du réseau en attirant davantage de candidats. Rien de plus frustrant en effet que de voir son projet bloqué pour insuffisance d’apport, alors qu’on est un impétrant sérieux et motivé ! Mais quitte à accélérer son développement, autant le sécuriser pour mieux le pérenniser. Dans cette perspective, il faut savoir conserver des emplacements clés à l’extinction du contrat de franchise. L’emplacement est une variable n’ayant jamais vu son caractère stratégique remis en cause, bien au contraire, et y compris en contexte de renchérissement des prix.

Les limites et points de vigilance

Elles sont de trois natures :

1) Economique

  • la formule peut être discriminante en ce qu’elle est consommatrice de cash  (trésorerie ou emprunt) ;
  • il convient de rester vigilant quant aux conditions de sortie, en particulier au mode de valorisation des parts que le franchisé devra racheter à l’échéance stipulée ;
  • le concept doit générer un rythme et un volume de revenus suffisants pour pouvoir justifier économiquement l’opération le moment venu ;

 

2) Juridique

  • il est nécessaire de définir une participation inférieure à la minorité de blocage définie par les statuts ;
  • le pacte d’actionnaires doit être annexé au contrat de franchise ;
  • le traitement d’un conflit en cas de désaccord portant sur l’exécution du contrat prendra une autre dimension entre deux coactionnaires ;
  • plus globalement la franchise participative demeure un usage non encadré, donc en insécurité juridique relative ;

 

3) Managériale et opérationnelle

  • la légitime vigilance (pourrait-on parler de contrôle ?) de l’actionnaire et l’irréductible indépendance du franchisé doivent être conciliés en permanence ;
  • le périmètre d’intervention respectif des deux partenaires est à définir de manière adulte et suffisamment claire ;
  • le franchiseur ne saurait céder à la tentation d’ingérence et sortir de son rôle desleeping partner, pour risquer de déresponsabiliser son franchisé au point d’en faire un locataire-gérant de fait ;
  • enfin, il ne saurait abuser des clauses d’exclusivité (fourniture en tête).

En synthèse, la franchise participative s’avère un excellent révélateur du niveau de vision, de professionnalisme et de moyens dont dispose un franchiseur pour son réseau. Alors doit-on s’y lancer ? Pour quels types de dossiers ? A quelle hauteur de participation ? S’agit-il d’une stratégie de développement à part entière ou d’un simple « dépannage » ?

Savoir concilier tous les impératifs évoqués implique un niveau de maturité et d’expérience réel en tant que franchiseur. Si la franchise participative n’était pas pour toutes les bourses, elle n’est certainement pas à mettre en toutes les mains… du moins pour le moment !

 

L’auteur

Expert-comptable diplômée, Elodie Chevallier est Associée au sein de l’activité accompagnement comptable et financier de Mazars.

Dans le cadre du Département Commerce Organisé de Mazars, elle accompagne une clientèle d’enseignes et d’affiliés de secteurs variés (esthétique, restauration spécialisée, immobilier, ameublement…)

Documents

Tribune Franchise - Franchise participative, une si bonne idée ?
Recueil Franchise - Franchiseurs