Loi Travail et installation du CSE : quels impacts sur les relations sociales ?

La culture syndicale fait partie intégrante de l’ADN du secteur de la santé, les syndicats ont toujours été influents sur le terrain humain et social. Le dialogue social participe à l'adhésion de tous au projet collectif de l’entité. Il contribue à la performance de cette dernière en matière économique, en matière de santé, sécurité, conditions de travail, et qualité de vie au travail des salariés, et donc au progrès social. Il favorise l’émergence de points d’équilibre entre les différentes parties, permet une meilleure cohésion, un meilleur partage des enjeux et de la politique économique et sociale.

Avec la mise en place de la loi Travail, le management et plus encore le management de proximité, vont avoir un rôle majeur dans le dialogue social.

L’ordonnance n°2017-1386, promulguée en septembre 2017, impose la mise en place d’un Comité Social et Economique (CSE) dans les organisations de plus de 11 salariés, au plus tard le 1er janvier 2020. Au-delà de l’objectif de mise en conformité, l’installation du CSE constitue pour les organisations une opportunité de poser les bases d'un dialogue social de qualité et de répondre au mieux aux préoccupations économiques et sociales des organisations.

Mais que représente réellement le CSE ? Comment installer la nouvelle instance ? Et que craindre de cette fusion ?

Le (CSE) en quelques mots c’est quoi ?

Né de la fusion des différentes Instances Représentatives du Personnel (Comité d’entreprise, délégués du personnel et CHSCT), le CSE est la généralisation de la délégation unique du personnel (DUP).

Le CSE a pour rôle de “promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail” et “d’assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions”. Le CSE aurait donc pour vocation à devenir le porte-voix des salariés en matière de Qualité de vie au travail (QVT).

Comment le mettre en place ?

La mise en place d’un Comité Social et Economique (CSE) est rendue obligatoire et encadrée par les ordonnances Macron du 22 septembre 2017 (ordonnance 1386) dans le cadre de la réforme du Code du Travail.

Le CSE se met en place au niveau de l’organisation par la formalisation d’un accord qui sera en charge de définir les modalités de fonctionnement de l’instance (nombre de représentants, attributions, nombre de réunion…).

Les organisations possédant plusieurs structures doivent constituer des CSE au niveau des établissements. :

  • Un accord majoritaire;
  • Dans le cas d’absence d’accord collectif, un accord entre l’employeur et le CSE peut être adopté à la majorité des élus titulaires ;
  • Enfin en l’absence de tout accord, l’employeur fixe unilatéralement le nombre et le périmètre des établissements distincts.

Le non-respect de la procédure de mise en place du CSE comporte quelques risques dont notamment la nullité de l’accord collectif. Les employeurs qui ne seront pas à jour de leur obligation au 1er janvier 2020 risquent des peines pouvant aller jusqu’à 1 an d’emprisonnement et une amende minimum de 7.500 €, sans compter la perte de certaines exonérations sociales, fiscales et les nombreuses difficultés en matière de gestion du personnel qu’ils pourraient rencontrer (nullité de procédures RH par exemple, …).

Au-delà du changement réglementaire, en quoi le CSE bouscule-t-il la nature des relations sociales ?

Les évolutions récentes du cadre législatif bouleversent les modalités du dialogue social, notamment sur les questions de santé au travail et de conditions de travail. Il est désormais possible aux acteurs du dialogue social et économique de négocier au plus près du terrain des règles qui prennent mieux en compte les attentes des salariés comme les besoins des organisations.

Le dialogue social est ainsi frappé par un profond bouleversement :

  • Le dialogue social ne passera plus nécessairement par des représentants de proximité. Certains directeurs ne seront donc plus les acteurs privilégiés du dialogue social en local. La réforme induit la baisse du nombre d’élus et fait craindre une professionnalisation et une coupure progressive du terrain. D’où l’importance de négocier des représentants de proximité et d’en définir le rôle et la mission, qui peut inclure des actions sur la santé et le bien-être au travail.
  • Les futurs animateurs des CSE (Présidents et experts RH) ne disposeront pas d’une expertise forte en termes de dialogue social. Le risque est de voir des sujets nécessitant une expertise particulière, comme les conditions de travail des salariés, dilués dans les échanges transversaux au sein du CSE. Il faudra donc veiller au nombre de sujets qui devront être traités par le CSE et prévenir le risque de goulot d’étranglement.
  • La réforme induit un changement dans les flux de communication. La disparition d’acteurs bien identifiés avec des relais terrain tel que des CHSCT, la réduction des moyens et la coexistence des délégués syndicaux, qui restent seuls négociateurs des accords QVT avec la Direction, font planer le doute sur la capacité du CSE à endosser ce rôle.

En conclusion, le CSE deviendrait négociateur, en particulier sur les accords relatifs à la QVT. Une étape décisive, qui pourrait aboutir à un meilleur équilibre des pouvoirs et à une véritable codécision, si les CSE démontrent activement leur montée en compétences sur le sujet et leur représentativité.

Face à de tels enjeux sociaux, les ordonnances appellent les acteurs des organisations à un élan d’innovation ! Les cadres d’organisation, les modalités de fonctionnement, de relations sociales doivent être renouvelés, réajustés, réinventés.

Sarah Bennis, Manager au sein de l'équipe Mazars Santé

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