Flash BankNews n°73 | Connaissance client : quelles nouveautés ?

L’ACPR a publié, le 16 décembre 2021, la nouvelle version de ses lignes directrices relatives à l’identification, la vérification de l’identité et la connaissance de la clientèle. Ces dernières nécessitaient une mise à jour afin de prendre en considération les dispositions issues de la transposition de la directive UE n°2015/849 (dite « 5ème directive anti-blanchiment ») et de l’arrêté du 6 janvier 2021 relatif au dispositif et au contrôle interne en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et de gel des avoirs et d'interdiction de mise à disposition ou d'utilisation des fonds ou ressources économiques.

Les évolutions de ces nouvelles lignes directrices se concentrent sur les trois éléments suivants :

  • Les mesures de vérification de l’identité du client.
  • Le registre des bénéficiaires effectifs.
  • Le régime dérogatoire pour les EME.

 Nous vous proposons de réaliser dans ce Flash BankNews une synthèse des principaux apports de cette mise à jour.

Mesures de vérification de l’identité du client

La section 2.1.2 des lignes directrices relative à la vérification de l’identité du client a été intégralement refondue. Les modifications sont les suivantes :

1. Les lignes directrices viennent préciser les dispositions de l’article R. 561-5-1 du CMF dans le cadre de la possibilité de vérifier l’identité d’un client par l’utilisation d’un moyen d’identification électronique. Il faut que ce support soit :

  • certifié ou attesté conforme au niveau de garantie au moins substantiel au sens du règlement européen n° 910/2014 « eIDas » ou ;
  • délivré dans le cadre d’un schémas français d’identification électronique notifié à la Commission européenne ou d’un schéma d’identification d’un autre Etat membre dans les mêmes conditions.

2. En ce qui concerne  les clients personnes physiques,  la vérification de son identité doit se faire par la collecte de l’original d’un document officiel d’identité en cours de validité qui doit comporter une photographie (carte nationale d’identité, passeport, titre de séjour, etc.). La validité du document exclue donc a fortiori tout document périmé quel que soit le caractère récent de la péremption. Les lignes directrices font une liste des documents que peuvent accepter les organismes financiers à cette fin. De plus, les procédures internes de ces derniers doivent lister les documents qu’ils jugent recevables pour satisfaire à l’obligation de vérification qui s’impose à eux (article 6 de l’arrêté du 6 janvier 2021). Il convient de rappeler que le client personne physique doit être présent physiquement lors de son identification, cela exclue donc la vidéoconférence.

3. En ce qui concerne les clients personnes morales, les lignes directrices rappellent les deux modalités possibles de vérification d’un tel client (article R. 561-5-1 du CMF) :

  • D’une part, lorsque le représentant de la personne morale dûment habilité est physiquement présent lors de l’identification de la relation d’affaires, la vérification de l’identité d’une personne morale peut se faire par la communication de l’original ou de la copie de tout acte ou extrait de registre officiel datant de moins de trois mois ou extrait de Journal officiel. Ces documents doivent constater la dénomination, la forme juridique, l’adresse du siège social et l’identité des associés et dirigeants sociaux, ainsi que des représentants légaux. Il s’agira par exemple, pour une société d’un extrait de K-bis datant de moins de trois mois ou pour une association d’un extrait de Journal officiel constatant sa déclaration en préfecture.
  • D’autre part, cette vérification peut se faire en obtenant une copie certifiée du document directement via les greffes des tribunaux de commerce, DataInpi ou un document équivalent en droit étranger. Cette méthode peut être mise en place lorsque que le représentant dûment habilité du client personne morale n’est pas physiquement présent lors de l’identification de la relation d’affaires. Il convient de préciser que cela exclut que la copie certifiée du document soit fournie directement par le client.

4. Les lignes directrices prévoient que lorsque les mesures prévues à l’article R. 561-5-1, CMF ne peuvent pas être mises en œuvre, les organismes assujettis doivent appliquer deux des mesures prévues à l’article R. 561-5-2 du CMF afin de vérifier l’identité de leur client. Concernant ce dernier article et notamment son 3°, il prévoit que l’assujetti doit « exiger que le premier paiement des opérations soit effectué en provenance ou à destination d’un compte ouvert au nom du client auprès d’un organisme financier qui est établie dans un Etat membre de l’UE ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ». Dans ce cadre-là, les lignes directrices précisent que les organismes financiers doivent s’assurer qu’il ne s’agit pas d’un portefeuille de monnaie électronique. Ce dernier article prévoit notamment, en plus du moyen de vérification de l’identité du client subsidiaire susnommé, la possibilité d’obtenir la confirmation d’identité de la part d’un tiers. 

Les nouvelles implications concernant les bénéficiaires effectifs

Les lignes directrices rappellent la création du registre des bénéficiaires effectifs adossé au registre du commerce et des sociétés (« RCS ») qui est entré en vigueur le 1er août 2017. Dès lors, les sociétés de l’article L. 561-45-1 du CMF devront déclarer toutes informations relatives aux bénéficiaires effectifs. Cela concerne notamment les éléments d’identification du bénéficiaire effectif, son domicile personnel, ainsi que les modalités du contrôle qu’il exerce.

En outre, les lignes directrices mettent en évidence que les informations qui irriguent ce nouveau registre seront librement et intégralement accessibles à l’ensemble des organismes financiers par le biais de l’Instit Nationale de la Propriété Intellectuelle (INPI). Deux modalités sont alors possibles :

  1. Utiliser l’interface prévue à cet effet. Elle est accessible avec un identifiant et un mot de passe, idéale pour des consultations et téléchargements manuels à l’unité ;
  2. Utiliser des API (« Application Protocol Interface »), idéales pour des consultations et téléchargements automatisés en masse.

Les lignes directrices ajoutent que, même si la législation n’impose en aucun cas que les personnes assujetties se dotent de tels outils automatisés, cela pourrait se révéler nécessaire eu égard au volume des activités traité et à la taille de la société.

Par ailleurs, les lignes directrices précisent l’obligation pour les organismes assujettis de signaler au greffier du tribunal de commerce toute divergence qu’ils constatent entre les informations inscrites dans le registre des bénéficiaires effectifs et les informations sur les bénéficiaires effectifs dont ils disposent, y compris l’absence d’enregistrement de ces informations (article L. 561-47-1 du CMF). Toutes divergences doivent être déclarées, que ce soit lors de l’entrée en relation d’affaires ou lors de l’actualisation du dossier client. Lorsqu’une divergence est constatée, le greffier précise cette dernière en apposant une mention au registre. De plus, il invitera par la suite l’entité en question à régulariser son dossier avant que cette dernière soit forcée par le président du tribunal. Un portail de signalement des divergences a été créé afin de faciliter ces démarches.

En outre, les lignes directrices indiquent que l’article 1649 AB du Code général des impôts impose des obligations de déclaration du bénéficiaire effectif à l’administrateur d’un trust lorsque :

  1. Le constituant de ce trust ou l'un au moins des bénéficiaires de ce dernier a son domicile fiscal en France ou qui comprend un bien ou un droit qui y est situé ;
  2. Le constituant acquiert un bien immobilier ou qu’il entre en relation d’affaires en France et qu’il est établi ou réside en dehors de l'Union européenne ;
  3. Le constituant dispose d’un domicile fiscal en France.

Dans ces trois hypothèses, l’administrateur du trust doit déclarer « les informations relatives aux nom, prénoms, adresse, date, lieu de naissance et nationalité des bénéficiaires effectifs des trusts, qui s'entendent comme toutes personnes physiques ayant la qualité d'administrateur, de constituant, de bénéficiaire et, le cas échéant, de protecteur ainsi que de toute autre personne physique exerçant un contrôle effectif sur le trust ou exerçant des fonctions équivalentes ou similaires ». Ces informations sont conservées dans un registre placé sous la responsabilité du ministre chargé du budget.

En ce qui concerne la fiducie, les nom, prénom, adresse, date et lieu de naissance ainsi que la nationalité des bénéficiaires effectifs d’un tel mécanisme juridique sont centralisés dans le registre national des fiducies institué à l’article 2020 du Code civil.

Comme ce qui est prévu pour les sociétés, les informations de ce registre sont accessibles aux entités dans le cadre de la mise en œuvre des obligations de vigilance en matière de LCB-FT. Enfin, il est précisé que les organismes assujettis ont également l’obligation de signaler à l’administration toute divergence qu’ils constatent entre les informations contenues dans les registres prévus aux articles 1649 AB du code général des impôts ou 2020 du code civil avec les informations dont ils disposent, y compris l’absence d’enregistrement d’informations (article L. 102 AH du Livre des procédures fiscales).

La mise en place d’un régime dérogatoire pour les émetteurs de monnaie électronique concernant l’identification et la vérification du client et du bénéficiaire effectif

Les lignes directrices explicitent la dérogation qui existe aux obligations de vigilance à l’égard de la relation d’affaires pour les émetteurs de monnaie électronique en application de l’article L. 561-9-1 du CMF. Cela concerne les produits de monnaie électronique dits « anonymes ». Il en résulte que ces organismes financiers ne sont pas soumis aux obligations d’identification et de vérification de leur clientèle si les conditions de l’article R. 561-16-1 sont réunies.

Cependant, les émetteurs de monnaie électronique doivent tout de même identifier et vérifier l’identité de leur client ou du bénéficiaire effectif lorsque :

  1. Il effectue des opérations de retrait d’un montant supérieur à 50 euros ;
  2. Il obtient un remboursement en espèces de la monnaie électronique dont le montant dépasse 50 euros ;
  3. Il effectue une opération initiée par internet ou par un autre moyen de communication à distance dont le montant unitaire dépasse 50 euros.

Les équipes Mazars Sécurité Financière sont à votre disposition pour vous aider à intégrer ces modifications et optimiser vos dispositifs.