Luxe et Covid-19 : les marques revisitent leurs stratégies

Les mesures de confinement et de distanciation sociale introduites dans le monde entier en réponse au virus ont entraîné la fermeture des magasins - certains pendant des semaines - dans les capitales du luxe que sont Londres, Paris, New York et d'autres. Après que des marques se soient efforcées de protéger leurs employés et leurs clients en suivant ces recommandations, des noms connus comme Prada et Louis Vuitton se sont tournés vers la fabrication d'équipements médicaux. Dans le même temps, le secteur a dû faire face à un ralentissement économique massif qui pourrait faire chuter les ventes mondiales de produits de luxe de 25 à 30 % d'une année sur l’autre[¹].

Ondes de choc pour les petites marques

Un tel choc aura des répercussions sur l'ensemble du secteur, mais il sera particulièrement ressenti par les petites marques de luxe indépendantes. Les grossistes ayant temporairement fermé leurs portes, les petites marques ont été coupées de leurs clients. Encouragées à travailler par l’intermédiaire des grossistes, de nombreuses petites marques n'ont pas d'offre en ligne développée et ont du mal à vendre. La crise leur rappelle avec force, qu'il leur faut plus d'une voie d'accès au marché, ce qui pourrait les inciter à créer et à améliorer leurs options de commerce en ligne, ainsi que leur présence sur le marché.

Les petites marques sont doublement touchées car, en période de ralentissement économique, les clients ont tendance à préférer les marques établies, dont ils peuvent être plus confiants quant au retour sur investissement à l'avenir. Les grandes marques, quant à elles, peuvent s'attendre à récupérer une partie de leurs parts de marché auprès de concurrents plus jeunes.

Vers une "normalité" nouvelle

Le shopping de luxe va probablement redémarrer en Chine si le virus y reste sous contrôle, et les achats qui auraient été faits à l'étranger seront plutôt effectués dans le pays.

Lorsqu'ils se sentiront en sécurité, les consommateurs retourneront dans les magasins physiques (peut-être avec une passion renouvelée pour les expériences de la vie réelle), mais certaines habitudes d'achats en ligne développées pendant l'épidémie resteront en place, surtout si les marques améliorent leur jeu en matière de filtrage en ligne, d'expérience utilisateur et de marketing numérique.

Les goûts des clients peuvent également être influencés par l'impact plus large de l'épidémie et, ils peuvent s'attendre à ce que les marques de luxe agissent de plus en plus de manière responsable sur le plan environnemental et social, allant des changements des méthodes d'extraction et des conditions de travail des travailleurs. Les marques de luxe avaient déjà pris de tels engagements avant le début de la crise et elles continueront à le faire, même si cette ligne de conduite pose ses propres problèmes. Par exemple, Burberry - entre autres - s'est engagé à ne plus détruire les restes des marchandises à faible rotation, mais on ne sait pas encore comment gérer cette alternative.

Innovant et abordable

Le ralentissement économique va amener les marques de luxe à envisager des produits plus abordables. En plus de revoir leurs prix pour refléter le pouvoir d'achat réduit de nombreux clients de la classe moyenne, les marques exploitent les intérêts des clients plus jeunes et avides de technologie dans les économies émergentes. Baume et Mercier, par exemple, a récemment lancé des montres électroniques à un prix bien inférieur à celui de son modèle traditionnel. Cette tendance devrait se poursuivre car les marques cherchent à proposer des options moins coûteuses et à axer le marketing sur l'innovation plutôt que sur la réduction des prix.

La crise a également rappelé aux marques de luxe qu'elles doivent réduire leur dépendance à l'égard de certains marchés et proposer de nouvelles offres. Richemont a déjà fait un pas dans cette direction avec l'acquisition de "Watchfinder", qui aide les clients à trouver et à acheter des montres d'occasion.

Évolution des évènements dans l'industrie horlogère

En ce qui concerne le marché horloger dans son ensemble, la plupart des marchés ont connu une baisse significative en mars (21,9% en valeur), selon la Fédération de l'industrie horlogère suisse[²], l'Italie ayant chuté de 57,6% et Hong Kong de 41,3%, par exemple. Une nouvelle détérioration est attendue en avril.

Une conséquence clé de Covid-19 pour l'industrie horlogère sera probablement la réorganisation des évènements de l'industrie à mesure que les pressions financières augmentent. Alors qu'aujourd'hui, les marques de montres ont tendance à gérer leurs propres salons - Time to move, Watch and wonders, Baselworld La crise Covid-19 a exposé le risque et les dépenses qu'implique cette approche et, à l'avenir, nous pourrions voir les marques travailler ensemble sur des événements en direct.

Vision optimiste pour le Luxe

Si l'on considère l'avenir du secteur du luxe avec optimisme, il est capable de se redresser plus rapidement que d'autres, qui dépendent entièrement de la capacité des gens à voyager. Les produits de luxe offrent également aux gens la possibilité de posséder un bien tangible, contrairement aux actions. La crise Covid-19 encouragera les gens à penser différemment à ce qu'ils achètent et, pour les personnes fortunées, les produits de luxe sont un moyen de profiter de la vie.  Enfin, les marques peuvent s'attendre à ce que les consommateurs effectuent potentiellement les achats qu'ils ont reportés en raison du confinement.

Bien que le secteur ne soit ni logique ni essentiel, le luxe a résisté aux précédents ralentissements mondiaux et, il y a tout lieu de croire que les marques de luxe réagiront intelligemment et profiteront de cette période pour proposer des offres nouvelles sur le marché et au consommateur.

[1]https://www.bain.com/insights/luxury-after-coronavirus/

[2]https://www.fhs.swiss/eng/statistics.html

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