Le numérique responsable : les DSI au cœur du réacteur

Le 15 octobre 2021 |
Aujourd’hui, le numérique représente 4% des émissions de gaz à effet de serre : c’est deux fois plus que l’émission du transport aérien. Si le numérique est un formidable outil au service de la transition énergétique, il reste en effet paradoxalement particulièrement énergivore et source d’émission de gaz à effet de serre (GES). En 2021, comment changer la donne ? Quels leviers activer pour faire du numérique un numérique plus responsable ? Quels enjeux et défis pour la DSI ?

La consommation liée au numérique pourrait devenir dévastatrice

Ce n’est plus à prouver : l’utilisation de solutions numériques a de nombreux effets positifs sur l’environnement : dématérialisation, etc. Par ailleurs, compte tenu de la crise sanitaire et du bouleversement des mentalités qu’elle a occasionné, le numérique offre plus que jamais une grande flexibilité à l’origine d’une nette diminution des déplacements terrestres et aériens, polluants.

En revanche, la construction, la multiplication et l'utilisation des datacenters, des équipements ainsi que du réseau nécessaires à l’utilisation de solutions numériques impliquent une consommation énergivore ainsi qu’un appauvrissement en ressources naturelles. En effet, le numérique produit in fine des émissions de GES plus ou moins importantes selon décarbonation de la production énergétique : à titre d’exemple, un datacenter consomme autant qu’une ville de trente mille habitants1. Quant à l’appauvrissement en ressources naturelles, il peut être illustré par le cas de la production mondiale annuelle d’indium, dont 50%2 sert à la construction de téléviseurs connectés.

Les équipements, cas d’usage et quantités de données augmentent de jour en jour. Si aucune action n’est entreprise, la part du numérique dans les émissions mondiales de GES doublera dans les prochaines années3, pour en représenter possiblement 8% à l’horizon 2025. C’est pourquoi il est nécessaire de concilier l’utilisation des solutions numériques avec la problématique environnementale : c’est dans ce contexte que sont nés différents concepts tels que le green IT, le numérique responsable et la sobriété numérique, lesquels désignent les pratiques, les études et l’innovation autour du design, de la construction et de l’utilisation des technologies de l’information visant à réduire l’impact environnemental du numérique.

Différents leviers pour optimiser l’utilisation du numérique

Des initiatives concluantes et inspirantes

L’effort pour concilier numérique et environnement commence à l’échelle de l’individu même. Des changements dans la manière dont chacun consomme le numérique peuvent avoir un impact significatif : allonger la durée de vie des équipements, utiliser du matériel reconditionné, privilégier le Wifi plutôt que la 4G, etc. Chacun est en mesure d’adopter des comportements plus responsables, à minima pour ne pas mobiliser de façon inutile les datacenters. Cette vision implique que chacun s’écarte de ses usages instinctifs en tant qu’utilisateur, pour se rapprocher de l’intérêt général.

L’innovation peut également servir les objectifs du numérique responsable. En témoignent les datacenters en immersion dans des solutions liquides agissant comme de véritables conducteurs de chaleur et permettant une réduction drastique de la facture énergétique compte tenu de leur refroidissement. En matière d’intelligence artificielle, certaines solutions développées par le CEA Tech4 ont fait leurs preuves : notamment les robots destinés à la reconnaissance d’images et de mots clés. Grâce à leur architecture optimisée, ces assistants se veulent frugaux en termes de consommation énergétique.

Des recommandations pour mener à bien la transition

Dans une de ses publications5, le Cigref propose de travailler selon différentes dimensions pour instaurer des pratiques plus responsables du numérique au sein de l’entreprise :

  • mettre en place une gouvernance et un pilotage des actions,
  • accompagner les personnes et les métiers au sein de l’entreprise pour diffuser ces bonnes pratiques,
  • mettre en œuvre une politique d’achat responsable qui intègre l’ensemble du cycle de vie des matériels,
  • intégrer les enjeux de sobriété numérique dans les projets et les services numériques délivrés aux clients,
  • travailler au sein de l’écosystème,
  • limiter l’impact des données gérées,
  • rationaliser son infrastructure.

La DSI au cœur du réacteur

Dans un contexte réglementaire de plus en plus strict en faveur de la transition énergétique, la DSI doit faire preuve d’anticipation, notamment en travaillant dès à présent à sa sobriété numérique. S’il s’agit d’un acte citoyen, cette sobriété permet également de répondre aux attentes des collaborateurs, de plus en plus exigeants vis-à-vis de la posture de leur entreprise sur le sujet. En effet, 74% des Français6 estiment que leur entreprise devrait prendre des mesures pour réduire son impact environnemental du numérique et 85%7 indiquent que les entreprises sont à même d’agir en faveur de la cause environnementale tout en favorisant le progrès technologique.

Au-delà des aspects réglementaires, éthiques, ou liés à l’image de marque, la sobriété numérique peut également être source d’économie dans le budget IT avec des retours sur investissement parfois très rapides, comme l’a démontré l’entreprise Euriware, filiale d’Areva. Après avoir investi 50 000€ pour réduire la consommation électrique d’un de ses datacenters, l’entreprise a réalisé une économie de 56 000€ dès la première année8.

Pour agir efficacement, il est important de démarrer par l’évaluation du niveau de maturité de l’organisation et l’identification des postes à plus forte empreinte environnementale. Les premières actions porteront très certainement sur la durée de vie des équipements et la capacité de l’entreprise à mettre en œuvre des solutions de recyclage adaptées. Enfin, un autre axe de réflexion pourrait concerner la sensibilisation des salariés et la modification des usages : des initiatives comme le World Clean Up Day peuvent agir en ce sens.

Mazars s’engage activement en faveur d’une réduction de l’impact environnemental du numérique, en interne tout d’abord, mais également auprès de ses clients. Ces engagements sont matérialisés par la signature de la Charte du Numérique Responsable (auprès de l’INR) ainsi que du manifeste Planet Tech'Care, plateforme accompagnant les entreprises dans leur stratégie environnementale et soutenant les acteurs de la formation dans le développement des compétences en matière de numérique responsable.

1,2,8www.greenit.fr

3https://theshiftproject.org

4 CEA Tech Fr - Quand intelligence artificielle rime avec frugalité énergétique (cea-tech.fr)

5 Etude « Sobriété numérique : une démarche d’entreprise responsable » réalisée par le Cigref (octobre 2020)

6 Etude réalisée par Harris Interactive et SQLI Digital Experience (juin 2021)

7 Livre blanc « Construire la sortie de crise : quelles sont les attentes des Français vis-à-vis de l’entreprise ? » réalisé par FreeThinking et Viavoice à l’initiative de Mazars (juin 2021)

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