Déductibilité du Crédit d’Impôt Recherche (CIR) et transfert indirect de bénéfices à l’étranger

Le 17 mai 2022 |
Par cinq décisions du 29 mars 2022(1), la Cour Administrative d’Appel (CAA) de Versailles a confirmé qu’une société française pouvait, dans le cadre de prestations de recherche au profit d’une société mère étrangère, déduire de la base des coûts refacturés les subventions reçues de l’État (comme le Crédit d’Impôt Recherche) sans que cette décision puisse être regardée comme un transfert indirect de bénéfices à l’étranger.

L’affaire en cause

Une société française réalise des prestations de recherche et développement (R&D) dans le domaine des semi-conducteurs. A ce titre, elle a conclu avec sa société mère néerlandaise un contrat  de « sponsored design contract » prévoyant la déduction des subventions et des crédits d’impôt reçus de l’État de la base de coûts engagés dans le cadre de ses prestations de R&D. Par ailleurs, la société française perçoit une marge de 7% appliquée au prix de revient net calculé après déduction des subventions et CIR en question.

A l’issue d’une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2011, 2012 et 2013, l’administration fiscale a considéré que la société française avait indirectement transféré, en déduisant les subventions et CIR de la base de coûts refacturés, des bénéfices à sa société mère néerlandaise au sens de l’article 57 du CGI.

Pour rappel, le tribunal administratif de Montreuil avait fait droit à la demande de la société française en première instance(2).

La charge de la preuve incombe à l’administration fiscale

A l’instar de la décision Philips du Conseil d’État(3), la CAA de Versailles rappelle que la charge de la preuve incombe à l’administration fiscale. Elle précise en effet que la déduction, opérée par une société française pour la détermination du prix de cession du produit de sa recherche à facturer à une société étrangère qui lui est liée, des subventions et des crédits d’impôt qu’elle avait reçus de l’État pour le financement des projets correspondants, ne saurait être considérée comme permettent de présumer de l’existence d’un transfert de bénéfices à l’étranger. Il appartenait donc à l’administration fiscale de procéder à une analyse de comparabilité afin de démontrer que la marge appliquée au prix de revient net était inférieure à celle pratiquée par des entreprises indépendantes. A défaut d’avoir procédé à une telle analyse, l’administration fiscale n’apporte pas la preuve d’un transfert de bénéfices à l’étranger.

Par ces cinq décisions ainsi que l’arrêt Philips, la jurisprudence en matière de déduction de subventions et CIR est désormais bien établie. En effet, leur déduction de la base de coûts refacturée par une société française à sa société mère étrangère dans le cadre de prestations de recherche ne présume pas de l’existence d’un transfert de bénéfices à l’étranger.

(1) CAA Versailles, 1ère ch., 29 mars 2022 n° 20VE02081, n° 20VE02082, n° 20VE02083, n° 20VE02084, n° 20VE02090 min. c/ Sté STMicroelectronics

(2) Tribunal administratif Montreuil, 6 février 2020 n°1806119, min. c/ Sté STMicroelectronics

(3) CE 8e-3e ch., 19 septembre 2018 n° 405779, Sté Philips France

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