Les conséquences du pouvoir d’injonction avec astreinte de la DGCCRF se font sentir

Le 25 janvier 2023 |
La DGCCRF (Direction générale de la concurrence de la consommation et de la répression des fraudes) fait usage de son pouvoir d’injonction avec astreinte, prévu par l’article L470-1 III du Code de commerce, et va au bout de son raisonnement en demandant à une plateforme d’intermédiation le paiement de l’astreinte de 3,33 millions d’euros. Retour sur les conséquences de cette prérogative.

Le pouvoir d’injonction avec astreinte de la DGCCRF

Garante de l’ordre public économique, la DGCCRF dispose de pouvoirs importants tels que la possibilité d’utiliser des pouvoirs « correctifs » et de délivrer des injonctions. En effet, les agents de la CCRF sont susceptibles de prendre des mesures d’injonction sous astreinte à l’égard des auteurs de pratiques considérées comme illicites.

Lorsque le professionnel concerné n’a pas déféré dans le délai imparti à une injonction qui lui a été notifiée, l’autorité peut prononcer à son encontre une amende administrative. Elle peut depuis 2020, sous conditions, assortir sa mesure d’injonction d’une astreinte journalière.

Une célèbre plateforme d’intermédiation en fait les frais

L’affaire ne date pas d’hier : à la suite d’une assignation du Ministre chargé de l’économie, Bruno Le Maire, la plateforme de vente en ligne a été condamnée à une amende de 4 millions d’euros par le Tribunal de commerce de Paris le 2 septembre 2019.

A la suite d’une nouvelle enquête de la DGCCRF, il est apparu que ce site publiait toujours des conditions contractuelles comportant des clauses présentant un déséquilibre significatif sanctionnable.

Des clauses contractuelles déséquilibrées

Les clauses contractuelles dans le viseur de la DGCCRF ne respecteraient pas, pour elle, d’une part, l’équilibre du contrat, et d’autre part, le Règlement européen 2019/1150 du 20 juin 2019 promouvant l’équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d’intermédiation en ligne autrement nommé « Plateform to Business ».

Les clauses déséquilibrées consistaient en la possibilité de modification ou de résiliation unilatérale du contrat par la plateforme sans respect d’un préavis ou encore l’interdiction pour les vendeurs tiers de recontacter les clients ayant acheté leurs produits sur ladite plateforme.

L’article L470-1 I prévoit que les agents de la DGCCRF « (…) peuvent enjoindre à tout professionnel de se conformer aux dispositions du règlement (UE) 2019/1150 du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 promouvant l'équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices de services d'intermédiation en ligne ainsi que lui enjoindre de cesser tout agissement ou de supprimer toute clause contraire à ces dispositions ».

Un retard de mise en conformité sanctionné

Depuis le 5 décembre 20201, le Code de commerce prévoit que la DGCCRF peut assortir les mesures d’injonction d’une astreinte dont les montants peuvent aller jusqu’à 0,1 % du chiffre d'affaires mondial hors taxes réalisé au cours du dernier exercice clos. La particularité de ce nouveau pouvoir de la DGCCRF est que cette dernière a la possibilité de fixer une astreinte sans saisine d’une juridiction.

Forte de cette nouvelle prérogative, la DGCCRF prenait des mesures d’injonction à l’égard de la plateforme et imposait une date butoir de mise en conformité des conditions contractuelles au 22 mars 2022 assortie d’une astreinte de 90.000€ par jour de retard.

Prenant du retard dans sa mise en conformité, les nouvelles conditions contractuelles de la plateforme entraient en vigueur le 28 avril 2022, soit plus d’un mois après la date imposée par l’autorité de contrôle. En conséquence de quoi, le 20 décembre 2022, la DGCCRF demandait, pour la première fois, le paiement de l’astreinte fixée soit la somme de 3.33 millions d’Euros.

1 Modification de l’article L470-1 du Code de commerce par la Loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, entrée en vigueur le 5 décembre 2020

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