Le bureau, activateur des transformations d’entreprise ?

Le 27 avril 2022 |
Depuis l’apparition de l’open space au milieu du siècle dernier, l’immobilier tertiaire a connu des mutations successives qui ont souligné l’importance du levier immobilier dans la stratégie d’entreprise. Avec la pandémie, les tendances liées à l’aménagement de bureaux se sont multipliées et accélérées, sans pour autant qu’une véritable rupture ait été observée. Aujourd’hui, si le « moins mais mieux » fait consensus, cette formulation appelle à de multiples interprétations et questionne la raison d’être du bureau : jusqu’où peut-on « faire moins » ? Quelle place occupe désormais le bureau dans la stratégie d’entreprise ?

En 2022, le rôle et le coût du bureau sont remis en question

Les déclencheurs d’une restructuration affectant le parc immobilier sont nombreux, souvent économiques ou liés à la gouvernance. Ces évènements sont aussi et de plus en plus régulièrement engendrés par la volonté de l’entreprise de minimiser son empreinte carbone et d’assurer le bien-être de ses collaborateurs.

Le bureau change, se cherche et se réinvente au fil du temps et des échéances de baux, avec toujours pour premier objectif de répondre aux attentes et besoins évolutifs de ses occupants. Depuis plusieurs années, et encore plus depuis la crise sanitaire, deux questions clés sont au cœur des discussions :

  • Pourquoi le salarié vient-il au bureau ?
  • Comment transformer ce centre de coût en levier de performance ?

Ces deux interrogations sont l’occasion pour les entreprises de prendre du recul. En effet, les réponses apportées peuvent légitimement s’insérer dans une réflexion plus large d’évolution de la structuration de l’entreprise et de sa proposition de valeur.

Un vecteur de lien social à réinventer

En 2022, la motivation des salariés à venir au bureau dépend de plusieurs facteurs. Elle est intimement liée au secteur d’activité, à la fonction occupée par le salarié ainsi qu’à ses besoins personnels : il n’y a donc pas de règle unique ni de vérité générale.

L’envie de collaborer et d’interagir est la première raison pour laquelle les salariés désirent se rendre au bureau, sans nul doute la conséquence, le contrecoup, des confinements répétés. D’autre part, pour les salariés vivant dans des conditions précaires ou peu adaptées au télétravail, le bureau reste le lieu de travail privilégié. Ce cadre adéquat constitue le second motif pour lequel la venue au bureau peut, dans certains cas, être préférée au télétravail.

A ces facteurs s’ajoutent  une multitude de questions et problématiques sous-jacentes et non résolues requérant un travail de fond pour imaginer de nouveaux aménagements : typologies d’espaces, dimensionnement, flex office et taux de desk-sharing, parcours utilisateur, services intérieurs et extérieurs, localisation(s), modes d’occupation, accessibilité, équipements, curseur phygital, vie de quartier, coût global, monitoring et reporting… Autant de sujets techniques et pragmatiques qui invitent l’écosystème de l’entreprise à être intégralement repensé. Cela n’est évidemment pas sans conséquences sur la structuration des coûts fixes, qui peut s’en retrouver déséquilibrée voire fragilisée.  

Limiter les coûts financiers et l’impact environnemental

Sécuriser cette démarche revient à capitaliser sur l’immobilier comme levier de performance. A cet effet, identifier toutes les ramifications de l’entreprise pouvant être impactées par l’actif de bureaux apparait comme une nécessité, certes fastidieuse. Cela permet in fine une potentielle optimisation de l’empreinte carbone de l’entreprise, d’autant que le taux d’occupation moyen du tertiaire n’était que de 60%1 avant même la pandémie.

Il est courant de partir des piliers de la stratégie d’entreprise pour les décliner sur l’immobilier avant de creuser plus en détail les autres enjeux. L’approche collaborative est une démarche efficiente permettant d’aborder de front les thématiques à forts enjeux : image de marque et positionnement, attractivité et rétention des talents, visibilité auprès des clients et partenaires, positionnement concurrentiel, engagements RSE, innovation interne, smart building, synergies et rentabilité.

C’est seulement à l’issue d’un processus de questionnement collectif remettant en cause les fondements de l’entreprise que le levier immobilier est pleinement mis au profit de la performance collective, donc de l’entreprise.

Élargir la démarche au parc complet

La réflexion appliquée à l’exemple du bureau est pertinente et indispensable sur toutes les classes d’actifs et au niveau du parc. Elle permet d’afficher une cohérence venant souligner et renforcer les impacts de toute démarche de (re)structuration immobilière.

Cette démarche est d’autant plus à propos que la question de la décentralisation de l’entreprise est au cœur des préoccupations. Un challenge nouveau pour la plupart des Directions permettant de revoir la stratégie tout en étant acteur de l’attractivité des territoires.

On peut estimer une réduction allant jusqu’à 18%2 des surfaces de bureau à horizon 2026-2029, ce qui engendrerait mécaniquement, pour les entreprises, un gain financier ainsi que la réduction de leur empreinte carbone. Prioritaire, ce dernier volet ne doit pas concerner seulement le cœur d’activité mais bien tous les scopes de l’entreprise, dont son parc immobilier.

Justement,la lutte contre le réchauffement climatique est le moteur de nombreuses restructurations d’entreprises. Avec 30% des émissions mondiales de GES et 40% des consommations énergétiques3, l’immobilier doit être partie prenante de la restructuration, d’autant qu’une réglementation toujours plus stricte est en cours déploiement (décret tertiaire, taxonomie européenne, RE2020). Anticiper autant que possible ces évolutions réglementaires permettra de les aborder de manière structurée, plutôt que de les subir.

A ce jour, certaines entreprises ont déjà franchi le pas d’adapter leur consommation de mètres carrés aux nouveaux usages et formes du travail dans des projets immobiliers, sous l’impulsion d’une restructuration plus vaste de leur modèle et des effets de la pandémie.

Indiscutablement, l’immobilier occupe une place centrale dans la refonte des organisations en étant le relais de leurs valeurs, convictions et ambitions. Ce thème doit donc être abordé avec méthodologie et objectivité, objectivité pouvant s’acquérir grâce à un pilotage basé sur des indicateurs pertinents et notamment sur la donnée bâtimentaire, trop longtemps inexploitée.

1 Étude Cushman & Wakefield (C&W) "Bureaux : le monde d’après quelles options pour la réduction de vos coûts immobiliers ?"

2Selon le Groupe CBRE

3 UN Environmental Programme

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